Theory and History of Ontology (ontology.co)by Raul Corazzon | e-mail: rc@ontology.co

Bibliographie des études en Français sur Parménide (A - Cor)

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Heraclitus and Parmenides

Bibliographie A - Cor

  1. Année, Magali. 2010. "Le verbe « être » de Parménide: elaboration strategique d'une entité linguistique infaillible." Antiquorum Philosophia :75-97.

    ;"Au il d’une analyse structurelle, sémantique et morphologique des fragments, centrée sur l’énonciation du verbe être, j’essaierai de mettre en évidence que la fonction primordiale de la construction de ce verbe est, avant toutes choses, d’instituer la parole kosmologique du poète-savant en une parole d’autorité infaillible. Comme l’a dit J. Bollack de l’oeuvre d’Empédocle, il faut considérer le poème parménidien comme «une ample épopée, savante et visionnaire», mais discursive et parénétique, et non pas «narrative et didactique».(1) Car le verbe être que Parménide invente semble être au coeur d’une véritable stratégie d’énonciation visant plus à instaurer qu’à transmettre un savoir." (p. 79)

    (...)

    "Il ressort donc de ces remarques sur les emplois du pronom-adjectif τὸ et de la négation, que le discours de Parménide n’est pas tout entier tourné vers la construction d’un substantif contenant en germes le «concept» de l’être. Il donne plutôt l’impression d’élaborer un verbe être aux variations paradigmatiques sans limites, un verbe être métamorphique capable de se manifester n’importe où, un verbe être original, spécialement conçu pour et par le poème, dont la valeur n’a de sens que le temps de la profération du poème, ain d’assurer une assise infaillible à la parole même du poète-savant.(2)" (p. 82)

    (1) 1 Cf. Bollack 1965-1969, p. 7. J’ai volontairement substitué «discursive» à son «narrative».

    (2) Indépendamment de la question de la ixation écrite du poème dans sa forme déinitive, il est très probable que celui-ci a été destiné à une communication orale, visant un auditoire particulier. On sait, à en croire Aristote, que Parménide aurait eu pour maître Xénophane (Métaphysique A 5, 986 b 22, ὁ γὰρ Παρμενίδης τούτου λέγεται γενέσθαι μαθητής). Au sujet de l’inluence profonde de ce dernier sur la formation philosophique de Parménide, voir Mogyoródi 2006. Or, Xénophane est aussi connu pour les élégies qu’il a composées. Si les poèmes savants avaient pour cadre une «école», leur prononciation devant un «cercle d’étude» n’était peut-être pas si éloignée des performances élégiaques devant les convives de banquets. Quoi qu’il en soit, sortis du contexte pragmatique de son énonciation, le poème de Parménide et ses échafaudages linguistiques perdent sinon tout leur sens, du moins toute leur eicacité. Même si la vérité des fragments n’était certainement pas destinée à l’oubli, comme ce pouvait être le cas pour un texte de tragédie, puisque leur vérité repose justement, comme on va le voir, sur la continuité fondamentale du λόγος, j’oserai parler ici, pour emprunter un terme cher à Fl. Dupont (2001, notamment p. 25), d’une certaine «insignifiance» du verbe être.

    Références

    Bollack, J. 1965-1969, Empédocle , i, ii, iii, Paris, Les Éditions de Minuit; Gallimard, 1992.

    Dupont Florence 2001, L’insignifiance tragique, Paris, Gallimard.

    Mogyoródi Emese 2006, Xenophanes’ epistemology and Parmenides’ quest for knowledge, dans M. M. Sassi (éd.), La costruzione del discorso filosofico nell’età dei Presocratici = The Construction of Philosophical Discourse in the Age of Presocratics , Pisa, Edizioni della Normale, pp. 123-160.

  2. ———. 2012. Fragments. Poème . Paris: Vrin.

    ;Texte et traduction de Magali Année; précedé de Énoncer le verbe être (pp. 9-146).

    "L’élaboration singulière du verbe être, dans le poème dt Parménide, qui a dû frapper jusqu’à ses contemporain· mêmes, participe vraisemblablement d’un tel fonctionnement. Son déploiement tant syntaxique que sémantique et morphologique lui confère indéniablement une place fondamentale, partant un rôle clé, dans l’économie du discours d'ensemble. Ce qu’on désigne habituellement comme I’« ontologie» de Parménide, et que je me contenterai d’appeler « développement sur l’être», constitue, en effet, la première partie d’une longue composition poétique dont la seconde partie, beaucoup plus importante, dépend. S’il est vrai comme le prétend P. Aubenque, que «personne n’a jamar contesté que l’interprétation de la première partie commandait celle de la seconde»(1), il n’est, à ma connaissance, que J. Bollack(2), qui ait proposé d’y voir le moyen stratégique de fonder un discours kosmologique à partir d’un langage concentré sur lui-même. De fait, les emplois du verbe être dans chacune de ses réalisations morphologiques différentes, incitent d’eux-mêmes à une approche purement linguistique du poème, loin de la «surdétermination philosophique» qui empêche d’aborder le texte qui nous est parvenu avec innocence(3). Car la pensée qu’on y découvre, ne s’élabore fondamentalement que par le discours en train de se faire. Aussi laisserai-je volontairement de côté et le sens et la pensée «ontologiques» du verbe être, qui accompagnent certainement(4) son emploi dans le poème parménidien, pour me concentrer sur la fonction énonciative que ses valeurs sémantiques et son amplitude morphologique semblent signaler au destinataire comme autant d’indices linguistiques." (pp. 15-17, certaines notes ont été omises)

    (1) Cf. Aubenque, 1987, p. 103.

    (2) Dans son article de 1957, il montre déjà que le fragment 4 et le fragment 16, appartenant tous deux au discours kosmologique, se complètent parfaitement pour mettre en évidence la cohérence du tout. La kosmologie parménidienne refléterait au sein de l’apparence l’unité de l’être définie dans la première partie, et rendrait ainsi possible une expérience commune de l’être « au-delà des noms qui cachent ce qui est ». Voir Bollack 1957, en particulier, p. 64-65 et 70.

    (3) Cf. Wersinger 2008, p. 14.

    Références

    Aubenque (P.) 1987, « Syntaxe et sémantique de l’être dans le pi temo de Parménide », dans P. Aubenque (dir.), Études sur Parménide. Problèmes d’interprétation , t. Il, Paris, J. Vrin, 1987, p. 102-111.

    Bollack (J.) 1957, «Sur deux fragments de Parménide (4 et 16)», Revue des Études Grecques, 70,1957, p. 56-71.

    Wersinger (A.-G.) 2008, La sphère et l’intervalle. Le schème de I'Harmonie dans la pensée des anciens Grecs d’Homère à Platon. Grenoble, Jérôme Millon, 2008.

  3. ———. 2013. "Parménide. Recommencer le verbe être." Les Études philosophiques :463-491.

    ;"« Recommencer », c’est peut-être justement le propre du verbe être parménidien.

    « Toujours recommencé », un peu comme la mer de Valéry, mais linguistiquement seulement, c’est-à-dire « énoncé » une nouvelle fois, pour reprendre le titre de l’ouvrage qu’il s’agit ici de présenter et, en quelque sorte, de continuer : Parménide. Fragments, Poème , précédé de Énoncer le verbe être (Paris, Vrin, « Bibliothèque des textes philosophiques », 2012). Les lignes qui suivent, en effet, ont ceci de particulier qu’elles ne doivent pas s’entendre autrement que comme la restitution de la présentation qui a été prononcée dans le cadre du Séminaire « présocratique » du Centre Léon Robin, le 29 juin 2013. Elles n’ont de sens, autrement dit, qu’en tant que simple explicitation, ou justification, des intentions et de l’approche qui furent les miennes au moment de la rédaction du commentaire et de la traduction qui constituent ce livre." (p. 463)

  4. ———. 2019. "Discours en creux et négation de la négation. Quelques objections à la ‘sémantique de la disjonction’ et au principe d’ ‘incompatibilité sémique’ " In Eleatica Vol. 7: Parmenide: tra linguistica, letteratura e filosofia = Parménides: entre lingüística, literatura y filosofía , edited by Berruecos Frank, Bernardo and Giombini, Stefania, 121-134. Baden-Baden: Academia Verlag.

    ;"S’agissant d’un artisan-professionnel de la langue comme le fut Parménide – et comme le furent avant et après lui la plupart des poètes et savants de l’époque archaïque, «autant poètes que penseurs de la nature et de l’esprit humain»(1) – l’‘expérience’ linguistique que propose Alberto Bernabé au commencement de sa 2e leçon et qu’il poursuit dans la 3e, ne peut qu’être en tout point profitable. Comme les sessions d’Eleatica en sont l’une des plus belles illustrations, le poème de Parménide, sans doute plus que tout autre, ouvre la voie à une infinité d’interprétations, parfois radicalement contraires, mais toujours nécessairement complémentaires. Suivant l’esprit d’ouverture et d’échange qui caractérise ces sessions, je n’hésiterai donc pas à y participer à contre sens – en adoptant un point de vue linguistique παλίντροπος qui, outre qu’il me semble mieux adapté aux dictions savantes et poétiques de l’époque archaïque, se trouve être en accord avec certains aspects de la composition du poème, à commencer par celle de B 6, 8-9. " (p. 121)

    (1) Cf. Sassi 2015 [“Parmenides and Empedocles on Krasis and Knowledge”, Apeiron , October 2015), pp. 1-19], p. 16, à propos de Parménide et d’Empédocle «having addressed the issue of the conditions of knowledge as poets, students of nature, and philosophers of mind».

  5. Aubenque, Pierre, ed. 1987. Études sur Parménide. Tome II. Problèmes d'interprétation . Paris: Vrin.

    ;Table des matières:

    Première partie: Parménide.

    Néstor Luis Cordero: L'histoire du texte de Parménide p. 3; Lambros Couloubaritsis: Les multiples chemins de Parménide p. 25; Rémi Brague: La vraisemblance du faux: Parménide fr. I, 31-32 p. 44; Coloman Viola: Aux origines de la gnoséologie: réflexions sur le sens du fr. IV du Poème de Parménide p. 69; Pierre Aubenque: Syntaxe et sémantique de l'être dans le Poème de Parménide p. 102; Denis O'Brien: L'être et l'éternité p. 135; Barbara Cassin: Le chant des Sirènes dans le Poème de Parménide: quelques remarques sur le fr. VIII, 26-33 p. 163; Jürgen Wiesner: Überlegungen zu Parmenides, fr. VIII, 34 p. 170; Jean Frère: Parménide et l'ordre du monde: fr. VIII, 50-61 p. 192.

    Deuxième partie: La tradition de Parménide.

    Monique Dixsaut: Platon et le logos de Parménide p. 215; Guillaume Rocca-Serra: Parménide chez Diogène Laërce p. 254; Robert Muller: Euclide de Mégare et Parménide p. 274; Barbara Cassin et Michel Narcy: Parménide sophiste: la citation aristotélicienne du fr. XVI p. 277; Christian Guérard: Parménide d'Élée chez les Néoplatoniciens p. 294; Denis O'Brien: Problèmes d'établissement du texte: la transmission du Poème dans l'Antiquité p. 314.

    Index. 1. Index des passages de Parménide p. 353; 2. Index des passages cités d'auteurs anciens p. 359; 3. Index des auteurs modernes p. 371.

  6. ———. 1987. "Syntaxe et sémantique de l'être dans le Poème de Parménide." In Études sur Parménide. Tome II. Problèmes d'interprétation , edited by Aubenque, Pierre, 102-134. Paris: Vrin.

    ;"On voudrait s'efforcer ici de répondre à une question simple, mais probablement décisive: de quoi s'agit-il dans le Poème de Parménide? (...)" (p. 102)

    (...)

    "Donc l'être, et non d'abord l'unité. Mais pourquoi l'être?

    Pour répondre à la question du pourquoi, on en est réduit à des conjectures, car aucun texte conservé ne justifie explicitement le choix de Parménide. Mais ne pas se poser la question serait considérer comme allant de soi un choix qui ne s'imposait pas absolument, puisque Parménide aura été pendant longtemps le seul à le faire. Il faut, si difficile que ce soit après vingt-trois siècles de métaphysique, réactiver l'étonnement devant le fait que, avec Parménide, la philosophie se soit constituée pour la première fois comme ontologie, et non physiologie, cosmologie, théologie ou même hénologie.

    De surcroît, un certain nombre d'indices convergents permettent peut- être d'apporter à la question du pourquoi un début plausible de réponse. Nous rangerons ces indices sous cinq rubriques, en mentionnant à chaque fois le très petit nombre d'interprètes qui ont pu nous précéder sur cette voie." (pp. 108-109)

  7. Badiou, Alain. 2014. Parménide : l'être 1, figure ontologique, 1985 . Paris: Fayard.

    ;Texte établi par Véronique Pineau.

    "On peut présenter aussi simplement que possible les trois propositions principales de la façon suivante :

    - Proposition 1 : Parménide fonde la philosophie en proposant un noeud entièrement nouveau entre trois concepts, celui d'être, celui de pensée et celui de non-être.

    - Proposition 2 : ce noeud est borroméen. Ce qui veut dire que chacun des trois termes n'est lié à un autre que par le troisième. Centralement, que le noeud soit borroméen signifie que, pour Parménide, l'être n'est lié à la pensée par une relation identitaire (l'être est « le même » que la pensée) qu'autant qu'intervient le troisième terme, le non-être, sous la forme d'un acte : l'acte d'en interdire la pensée.

    - Proposition 3 : si tout cela relève de la philosophie et non du récit mythique (où il est souvent question, en Égypte comme en Inde, d'être et de non-être), c'est parce que, bien que proposé sous la forme d'un poème et comportant des éléments de récit sacré, le texte de Parménide, pour la première fois, se soutient, quant à ses propositions principales, d'un mathème: le raisonnement par l'absurde.

    Ainsi, la méthode de ce séminaire consiste bel et bien à tenter de démontrer qu'il y a de sérieuses raisons de tenir Parménide pour le fondateur d'une discipline nouvelle, non parce qu'il a vaticiné sur l'être et le non-être, comme le firent de nombreuses mythologies, mais parce qu'il a convoqué dans cette vaticination poétique son contraire, à savoir la rigueur universelle absolue des procédures mathématico-logiques qui, au même moment, trouvaient en Grèce leur forme définitive. Et ce, d'une double façon : topologie d'un noeud d'une part, structure logique du raisonnement apagogique de l'autre." (p. 6)

  8. Battistini, Yves. 1955. Trois presocratiques: Héraclite, Parménide, Empédocle . Paris: Gallimard.

    ;Deuxième édition augmentée avec le titre Trois Présocratiques , Paris: Gallimard, 1968.

  9. Beaufret, Jean. 1971. "Héraclite et Parménide." L'Herne no. 15:152-161.

    ;Repris dans J. Beaufret, Dialogue avec Heidegger. Philosophie grecque, Paris: Éditions de Minuit, 1973 pp. 38-51 (sur Parménide, pp. 45-51).

    Traduction en Anglais : Dialogue with Heidegger. Greek Philosophy, Bloomington: Indiana University Press, 2006, pp. 20-31.

    "Si le monde dit présocratique est riche en figures originales, Héraclite et Parménide sont les figures les plus radieusement centrales de ce monde. Car, avec Héraclite et Parménide, c'est la fondation même de la pensée occidentale qui s'accomplit. C'est à eux que remonte comme au secret de la source ce qu'il y a d'encore vivant et de toujours vivace au fond de nos pensées.

    On peut dire que c'est par eux que nous pensons, même si nous ne pensons pas à eux, car ils sont la lumière où se révèle initialement la profondeur de notre monde, profondeur que nous ne cessons d'être et qui, cependant, nous demeure d'autant plus énigmatique et ainsi d'autant mieux réservée que nous lui appartenons davantage au plus intime de notre histoire jusqu'ici advenue et encore à advenir." (p. 38)

    "Si Parménide est le penseur de l'être, comprenons maintenant que cette pensée de l'être ne porte pas plus ombrage au changement que la pensée du changement, tel que le conçoit Héraclite, n'ébranle une permanence fondamentale. Le mouvement n'apparaît à Héraclite que sur fond de permanence, et, lorsque Parménide pense face au non-être la permanence de l'être, c'est comme horizon immuable de la présence-absence qui est l'essence de tout changement. Loin donc qu'Héraclite et Parménide surgissent l'un contre l'autre dès l'aurore comme les champions d'une polémique inaugurale, peut-être sont-ils l'un et l'autre, malgré la différence de leurs paroles, à l'écoute d'un même λόγος auquel ils prêtent l'un comme l'autre une même oreille à l'origine de la pensée occidentale. Au fond, il n'y a peut-être pas plus d'immobilisme dans le Poème de Parménide qu'il n'y a de mobilisme dans les fragments d'Héraclite, ou plutôt permanence et changement sont aussi bien des deux côtés. Ainsi les deux langages divergent sans cependant se contrarier, exposant tous les deux le savoir grec de l'être, ce savoir être qui se déploie dans l'élément de la présence sans rien forcer ni tourmenter, sans esquiver ni se crisper, sans compromis ni démesure." (p. 50).

  10. Bollack, Jean. 1957. "Sur deux fragments de Parménide (4 et 16)." Revue des Études Grecques no. 70:56-71.

    ;Résumé : "Par l'étude grammaticale du fragment 4, l'auteur cherche à montrer que les vers appartiennent à la deuxième partie du poème, réservée aux Opinions, et que l'exhortation qu'on y trouve formulée concerne l'expérience de notre univers, et non la contemplation de l'Être vrai. Ces vers doivent donc être rapprochés du fragment 16, où il convient de donner à πλέον le sens de « plein » (et non de « prédominant »). Les deux textes réunis font valoir les prédicats de continuité, de cohérence et de plénitude, qui reviendraient à une forme d'être saisissable dans l'univers des choses devenues. L'étude des deux fragments forme ainsi une contribution au problème, essentiel pour la compréhension du poème de Parménide, des liens qui unissent les deux parties de l'oeuvre, l'Être et les apparences."

  11. ———. 1990. "La cosmologie parménidéenne de Parménide." In Herméneutique et Ontologie. Hommage à Pierre Aubenque , edited by Brague, Rémi and Courtine, Jean-François, 17-53. Paris: Presses Universitaires de France.

  12. ———. 2000. "La langue rencontre son objet. L'exorde du poème de Parménide." Dédale no. 11:434-442.

  13. ———. 2006. "Parménide, un auteur." Revue de Philosophie Ancienne no. 24:45-49.

    ;"La forme littéraire qu'a choisie Parménide pour s'exprimer, l'hexa mètre, a autant occupé les esprits que la contradiction construite entre les deux parties du poème, que l'on a cru énoncée comme une aporie par l'auteur lui-même. Le recours à la langue de l'épopée paraissait inadapté, imposé, mais mal assumé.

    (...)

    La doxographie sur ce sujet est riche et instructive ' - à côté d'une interprétation proprement dépréciative (le rejet a souvent été violent et radical)- on trouve le plus souvent une référence faite à l'environne ment culturel, mais parfois aussi le reflet du contenu2.Le point de vue défendu ici privilégie dans la forme littéraire la création du sens. Le choix des conventions techniques, largement héritées, doit être consi déré comme une décision initiale, qui en tant que telle revêt à son tour une importance historique et culturelle." (p. 45)

    (1) Voir, à titre d'exemple, l'article de Georg Wöhrl, « War Parmenides ein schlechter Dichter ? Oder : Zur Form des Wissensvermittlung in der früh griechischen Philosophie », dans W. Kullmann et J. Althoff (éds), Vermittlung und Tradierung von Wissen in der griechischen Philosophie , Tübingen, 1993,pp.167-180. 2. Voir Lambros Couloubaritsis, Mythe et Philosophie chez Parménide , Bruxelles, 1986, rattachant la forme et la démarche à « une transmutation profonde du mythe archaïque » (p. 252). Voir aussi sa présentation du problème tel qu'il a été traité dans la critique (la section « Le mythe du philosophe », pp. 129-133, et ailleurs.

  14. ———. 2006. Parménide: de l'étant au monde . Lagrasse: Verdier.

    ;"La familiarité avec le texte et avec l’histoire de la critique ma fortement soutenu, mais la relecture que je propose et le système qui s’y ébauche reposent autant, sinon davantage, sur une mise en question; c’est le propre d’un nouveau départ sur de nouvelles bases. Les certitudes anciennes y trouvent la place qui leur revenait. Les interprétations d’autres poètes anciens, Homère, Hésiode ou les tragiques, et autant de poètes modernes, m’ont beaucoup aidé et appris à mieux lire. La table n’est pas rase, mais on apprend à faire comme si c’était le cas. Il y a de quoi lire, mais il importe autant de recomposer librement, à la place de l’auteur, ce qu’on n’a pas Verbatim, en se servant de la logique qu’on est parvenu par ailleurs à reconstituer. Si l’on s’entend sur cette obligation, on pourra faire d’autres progrès. J’ai essayé d’aller le plus loin possible sur la base de ce travail, sans me laisser effrayer par les lacunes et les pertes. On tente l’impossible et on a les moyens de s’aventurer avec ce qui se trouve déjà quasi archéologiquement repéré." (pp. 8-9)

  15. Bollack, Jean, and Wissman, Heinz. 1974. "Le moment théorique: Parménide fr. 8,42 - 49." Revue de Sciences Humaines no. 39:203-212.

  16. Boussoulas, Nicolas-Isidore. 1964. "La structure du mélange dans la pensée de Parménide." Revue de Métaphysique et de Morale :1-13.

    ;"II semble de primea bord très difficiled e parler de mélange chez Parménide.

    En effet, chez un penseur pour qui, en dehors de l'Être, il n'existe rien d'autre, comment déceler la moindre trace d'une intuition des mixtes ?

    Et pourtant, à y voir de plus près, il existe dans le poème parménidien l'entité de la mixtion, dans sa seconde aussi bien que dans sa première partie, qui nous décrit l'Être absolu.

    Mais pour détecter cette structure, il serait plus efficace de commencer par la deuxième partie du poème, celle qui traite des Opinions, pour s'acheminer par la suite vers la première partie, purement ontologique.

    Et tout d'abord, nous ne pensons pas que la partie traitant de la Physique n'ait absolument rien à faire a vec la Vérité.(1)'"

    (...)

    "II y aurait chez Parménide la même différence entre le domaine de l'Ontologique et celui du Physique que celle existant chez Platon relativement à ces deux ordres : dans le Tintée, l'Être est taxé de vérité, tandis que tout ce qui concerne le devenir relève de l'opinion ; en d'autres termes, du probable et du vraisemblable."

    (...)

    "Et maintenant, après ces quelques remarques préliminaires, lisons attentivement cette deuxième partie du poème. Nous constatons aussitôt qu'elle est presque entièrement dominée par l'idée du Mélange." (pp. 1-2)

    (1) Cf., par exemple, J. Burnet : L'Aurore de la Philosophie grecque ,p. 213.

  17. Brague, Rémi. 1987. "La vraisemblance du faux (Parménide, Fr. I, 31-32)." In Études sur Parménide. Tome II. Problèmes d'interprétation , edited by Aubenque, Pierre, 44-68. Paris: Vrin.

    ;Repris dans Rémi Brague, Introduction au monde grec. Études d'histoire de la philosophie , Chatou: Les Éditions de la Transparence 2005 (Édition revue 2008), pp. 101-142.

    "Les deux derniers vers du premier fragment de Parménide, qui contient le prologue de son poème ontologique et cosmologique, comptent parmi les plus ardus et les plus âprement discutés de son oeuvre, ou de ce qui nous en est parvenu. Le fait est d'autant plus regrettable qu'ils constituent à l'évidence l'annonce par la déesse qui instruit le poète-philosophe du programme qu'il lui faudra étudier, et qu'ils sont donc comme la clef de tout le poème. Malgré les efforts de beaucoup de très bons esprits, armés d'une incontestable érudition, aucune interprétation ne semble capable de recueillir l'adhésion générale. Nous aimerions intervenir dans ce débat, non pour rivaliser avec de plus savants que nous, mais pour attirer l'attention sur un fait nouveau, résultat des travaux de ceux-ci, mais qui ne nous semble pas avoir été remarqué comme il le mériterait.

    Il nous semble en effet que les efforts des philologues et des philosophes ont abouti, il y a un peu plus de dix ans, à une situation herméneutique nouvelle et simplifiée. Avant cette date, les interprétations les plus variées de ces deux vers semblaient pouvoir être admises, au moins en principe. Ce n'est, à notre avis, plus le cas. Les arguments en sont venus, nous semble-t-il, à s'annuler les uns les autres, de façon à exclure toutes les possibilités d'interprétation. Une telle situation d'aporie, si elle doit s'avérer définitive, impose un réexamen d'ensemble de la question. Nous nous proposons donc de mettre en évidence les obstacles infranchissables que rencontre toute tentative d'interprétation, avant de proposer une solution." (p. 44)

  18. Bredlow, Luis André. 2011. "La théologie des passions dans le poème de Parménide (frs. 12-13 D-K)." In Figures de la passion et de l'amour , edited by Chateua, Dominique and Salabert, Pierre, 91-107. Paris: L'Harmattan.

    ;"La tradition classique de la philosophie grecque — dont nous sommes héritiers, de bon ou mauvais gré, et même sans le savoir — a marqué les passions du double stigmate de la réduction à l’intériorité de l’individu et de la relégation à un niveau inférieur de la vie consciente." (p. 91)

    (...)

    "Mais il fut un temps, pas très éloigné de l’époque de Platon et d’Aristote, où ce que nous appelons les passions de l’âme était conçu comme des divinités vivantes, objet du culte des communautés humaines, et dont le pouvoir, vivifiant ou destructeur, loin de demeurer renfermé dans l’intimité de l’âme individuelle, se répandait sur l’ensemble du monde naturel. C’est la situation que nous trouvons chez Hésiode, parfois encore chez les poètes tragiques, et un peu partout dans le folklore et les coutumes religieuses des Grecs. Pourtant, je préfère me concentrer ici sur un bref commentaire des fragments « théologiques » de Parménide d’Élée (frs. 12-13 Diels-Kranz) : c’est, certes, un document — hélas ! — très fragmentaire, mais qui a l’avantage de nous laisser entrevoir le surprenant degré de systématisation que ce complexe diffus de croyances et de pratiques avait acquis dans ses formulations les plus mûres." (p. 92)

  19. Briand, Michel. 2020. "Pindare et Parménide, poètes et penseurs jeux de métaphores et effets pragmatiques." Dialogues d'histoire ancienne no. 46:75-104.

    ;Résumé : "Pindare et Parménide, poètes et penseurs : jeux de métaphores et effets pragmatiques. Aidée des notions de cognition incarnée et métaphore conceptuelle, l’analyse porte sur l’interaction entre jeux de langage et pensée ou imagination et connaissance, dans la poésie de Pindare et dans la philosophie de Parménide, par exemple : le char des Muses et la voie du poète et de son chant (Parménide, fr. 1, 2, 3, 8, et Pindare, dans une trentaine de cas, dont l’Olympique 6) ; les figures synesthésiques du regard et de la lumière, où Parménide, fr. 1, 4, 7 à 12, 14, rappelle la poétique pindarique de l’éclat ; des maximes sur la meilleure manière de sentir, penser, agir (Parménide, fr. 1, 2, 4, 6, 7, 8 ; Pindare, par exemple Pythique 2, 72 ou 3, 61-62). On trouve ici en germe une distinction poésie/philosophie, mais riche d’analogies primordiales."

  20. Brisson, Luc. 1990. "Remarques sur les études parménidiennes en France." Revue des Études Grecques no. 103:684-692.

    ;"L·ouvrage dédié à la mémoire de Pierre-Maxime Schuhl. est le plus important. sur Parménide depuis très longtemps : deux tomes totalisant. plus de 700 pages et comprenant le texte grec., une traduction française et une traduction anglaise des fragments du Poème. traduction annotée et complétée par un Essai critique et par quinze études résultant des travaux du Centre Léon Robin.

    (...)

    "L'index des mots grecs est un modèle à suivre. On y trouve les 1147 mot.s qui subsistent du Poème de Parménide. Les différentes formes d'un mème vocable sont indiquées; quelquefois mème, ces formes sont accompagnét•s de renmarques grammaticales qui indiquent le choix du traducteur." (pp. 684-685)

    (...)

    "Que dire sur l'ensemble de cet important travail'? Une fois de plus, il ne saurait être question d'entrer dans les détails. Je ne ferai donc que quelques remarques, et je formulerai une idée que je développerai et dont j'essaierai de tirer tout.es les conséquences.

    Alors que le premier tome constitue dans son ensemble et pour ce qui est de son orientation générale une critique des positions, des présupposés et des orientations analytiques de G.E.L. Owen en particulier et de !'École philosophique d'Oxford en général, une critique qui ne peut s'empêcher d'adopter la méthode argumentative de ceux qu'elle vise, le second se trouve surtout sous l'influence d'une herméneutique d'inspiration heideggerienne, un Heidegger représenté par .J. Beaufret. En fait, cette dualité reflète plus généralement la ligne de partage qui s'est institutée ces dernières années, en France, entre les chercheurs en philosophie grecque." (p. 691)

    (1) Éludes sur Parménide , puhlièes sous la direction de Pierre Aubenque, Ribliothèque dìHistoire de la Philosophie. tome I : l..e Poème de Parménide. texte, traduction, essai critique par Denis O'Brien en collahoration avec .Jean Frère pour la traduction française. Paris (Vrin) HJ8i. XXIv+ :324 p. tome II : Problèmes d'inlerprélalion, par un groupe de chercheurs. Paris (Vrin) 1987. [IV] + 378 p.

  21. Brunschwig, Jacques. 1990. "Parménide un et indivisible." In La philosophie et son histoire , edited by Vuillemin, Jules, 233-263. Paris: Odile Jacob.

  22. Casertano, Giovanni. 2002. "Parménide, Platon et la vérité." In Platon source des présocratiques. Éxplorations , edited by Dixsaut, Monique and Brancacci, Aldo, 67-92. Paris: Vrin.

    ;"Aux origines du problème de la vérité il y a Parménide. On parle de problème car, pour claires que soient les coordonnées théorétiques dans lesquelles se situe la perspective parménidienne, il n'est pas facile, ensuite, d'en dégager la signification et les implications. Le fragment 3 (« en effet penser et être sont la même chose »), lu en dehors de tout horizon néoplatonicien ou idéaliste, nous parle seulement d'une coïncidence, ou bien d'une identité, ou bien d'une inséparabilité : mais, tandis que « penser » est facile à entendre, il est plus difficile d'entendre le champ sémantique de « être ». On sait que Parménide n'utilise pas le terme « être » pour indiquer l'objet de sa recherche mais plutôt το έόν, l'étant, « ce qui est ». Voilà le premier problème : l'être de B 3 est-il le même que τὸ έόν, ou bien indique t-il autre chose? La question se complique parce que, à côté de « ce qui est » apparaît aussi un τὸ μὴ έόν, un non-étant, « ce qui n'est pas », qui n'est, comme il est dit explicitement, possible ni à connaître ni à exprimer (B 2.7-8: οὔτε γνοίης ... οὔτε φράσαις), donc qui, évidemment, n'est pas pensable. Il y a donc une relation étroite entre la séquence : être / penser connaître / exprimer-dire, et, de façon spéculaire par rapport à celle-ci, l'autre séquence : ne pas être / ne pas penser-ne pas connaître / ne pas exprimer - ne pas dire." (p. 67)

  23. Cassin, Barbara. 1980. Si Parménide. Le traité anonyme De Melisso Xenophane Gorgia. Édition critique et commentaire . Lille: Presses Universitaires de Lille.

    ;Le Parménide de Gorgias pp. 43-75.

    "«Si Parménide»: il s'agit d'ontologie, de sophistique, de doxographie. «Edition commentée du traité anonyme Sur Mélissus, Xénophane et Gorgias»: il s'agit de l'établissement d'un texte grec, de sa traduction, de leurs justifications. Du titre au sous-titre, il s'agit de philosophie et de philologie, d'un certain rapport entre elles." (p. 17)

    "[Dans le Poème de Parménide] la déesse nomme pour qui les portes se sont ouvertes, les deux seuls chemins qui s'offrent à la recherche:

    «L'un: que est et que n'est pas possible de n'être pas,

    l'autre: que n'est pas et qu'est besoin de n'être pas».

    L'énoncé de la première thèse de Gorgias [dans le traité De Melisso Xenophane Gorgia = G.], dans la reprise introduisant à sa démonstration, est littéralement identique au nom du second chemin: «n'est pas». Il ne faut pas croire pour autant que Gorgias, désobéissant délibérément à la déesse et au père Parménide, s'engage d'emblée déjà sur le chemin interdit, impraticable et qui n'aboutit pas ; rien d'une contestation aussi immédiate, primaire, et somme toute négligeable puisqu'elle donne du sophiste l'image bien connue d'un insolent blanc-bec prêt à tout pour faire le malin. Au contraire, «n'est pas» se présente explicitement comme une conséquence et le résultat d'une double démonstration. Or ces deux démonstrations constituent en elles-mêmes une interprétation du chemin du «est» tel qu'il est tracé dans le Poème et en marquent les étapes.

    C'est, tout d'abord, la différence entre les deux démonstrations proposées qui est significative. La première, celle qui est propre à Gorgias, porte sur le verbe comme tel: elle prouve que «n'est pas» parce que ni «être» ni «n'être pas» ne se soutiennent en position de verbe, parce qu'il n'y a pas de verbe pour être. La seconde, démonstration référentielle qui opère en combinant les thèses des autres Eléates, porte sur le sujet : elle prouve que «n'est pas» parce que, aucun prédicat ne convenant au sujet, il n'y a pas non plus de sujet pour être. C'est donc par deux fois qu'il faut conclure «n'est pas»: parce qu'il n'est pas vrai qu'il y ait être, et parce qu'il n'est pas vrai qu'il y ait un étant pour être. La duplication produit une structure de recul, d'ailleurs caractéristique tout au long du traité de la manière de Gorgias: il n'y a pas de verbe, et quand bien même il y aurait un verbe, ce verbe n'aurait pas de sujet. Ainsi s'interprète, avec ses deux négations en renfort portant l'une sur le verbe et l'autre sur le sujet, l'énoncé inaugural de cette première thèse, impossible en vertu des règles françaises de la double négation à rendre par la formule littérale «n'est pas rien», et qu'on peut transcrire d'un : «(il) n'est (absolument) rien».

    Si l'hypothèse texte contre texte est exacte, ce renchérissement démonstratif suppose à lui seul une certaine compréhension du Poème: à lire en deux temps ou trois mouvements, tels que de la position inaugurale du verbe «est» advienne, au moyen d'une prédication effective, la position seconde du sujet «l'étant».

    Puis l'annonce faite par l'Anonyme de la démonstration propre à Gorgias pour la première thèse est elle aussi révélatrice d'une lecture de même type. Elle tient en une phrase: «(il) n'est pas (possible) ni (d')être ni (de) ne pas être» (2). Les parenthèses sont là pour servir d'alibi, c'est-à-dire conférer à la phrase un ailleurs, une ubiquité, l'équivoque caractéristique de la tournure grecque. Car le grec veut dire à la fois: «ni être ni pas être ne sont», «il n'est pas possible ni d'être ni de n'être pas», «ce n'est ni être ni ne pas être». Et la démonstration elle-même prouve qu'aucun de ces sens n'est à exclure, mais qu'au contraire ils découlent l'un de l'autre de façon réglée: si les deux verbes «être» et «ne pas être» ne sont pas, ils ne peuvent pas plus l'un que l'autre servir effectivement de verbe et donc «il n'est pas possible ni d'être ni de n'être pas», auquel cas, quel que soit le sujet qu'on veuille supposer, ni être ni ne pas être n'en seront les prédicats, si bien que «ce n'est ni être ni pas être».

    Cet énoncé unique engage à explorer la prétendue tautologie parménidéenne, «l'être est», pour y lire non pas la fixité de l'identité stérile d'un «est» à jamais imposé, antihéraclitéisme caricatural, mais l'auto-mouvement en quelque sorte plus hégélien d'une identité vivante qui se développe dans la langue et en produit la logique comme syntaxe prédicative.

    Reste à éprouver directement cette lecture-miroir, sa possibilité et son intérêt, au contact du texte du Poème." (pp. 45-47)

    (1). G., 2., 1: hoti men ouk estin , «que (ce) n'est pas», reprend 28 B 2, 5 DK: hè d' hôs ouk estin : «l'autre: que n'est pas».

    (2) G., 1.,1: ouk einai... ouden ; voir commentaire p. 432 s.

    (3) G., 2., 19 s.

    Abréviations

    G. = Sur Gorgias

  24. ———. 1985. "Gorgias critique de Parménide." Siculorum Gymnasium no. 38:299-310.

  25. ———. 1987. "Le chant des Sirènes dans le Poème de Parménide: quelques remarques sur le fr. VIII, 26-33." In Études sur Parménide. Tome II. Problèmes d'interprétation , edited by Aubenque, Pierre, 163-169. Paris: Vrin.

    ;"Le Poème de Parménide est une épopée philosophique: "Odyssée spirituelle", cette quête cognitive, menacée par l'errance, d'un être d'exception divinement guidé. La pertinence du lieu commun fondé sur l'analogie de certains motifs et thèmes comme sur l'identité formelle de l'hexamètre, devient plus pressante lorsque les parallèles terminologiques ne relèvent manifestement pas du seul phrasé épique. L'un de ces parallèles me paraît devoir retenir singulièrement l'attention; il superpose en effet l'immobilité d'Ulysse lié au mât par ses compagnons dans l'épisode des Sirènes [Odyssée, XII, 158 ss], et l'immobilité de ce qui sera la sphère, retenue par une nécessité puissante dans les liens de la limite, l'un ou l'autre 'reste ici même solidement planté dans le sol'." (p. 163)

    "Odyssée et Poème servant tour à tour de propre et de métaphore ou d'allégorie l'un pour l'autre, le chant des Sirènes nous est ainsi apparu comme un miroir et donc une caricature de l'épopée dans l'épopée elle-même: Ulysse passe ligoté, préférant au bruit de sa gloire une identité minimale -- il sera reconnu de son chien en arrivant au pays. De façon parallèle, la doxa serait miroir ou caricature de l'alétheia au sein de l'alétheia elle-même, et l'étant qui lui échappe est lui aussi ligoté dans une identité minimale." (p. 169)

  26. ———. 1998. Parménide. Sur la nature ou sur l'Étant: la langue de l'Être ? Paris: Éditions du Seuil.

    ;"Le point nodal quant à l’interprétation littérale du Poème est alors le sens et le statut de la doxa. Si, comme on le fait toujours, on retient pour derniers vers du proème, non pas ceux que donne Sextus, mais ceux que transmet Simplicius, le poids du « doxique » s’accroît considérablement. On ne peut plus croire que les « opinions des mortels » (brotôn doxas , 30), qui vont faire partie de l’enseignement de la déesse accueillante au voyageur, soient un simple repoussoir. Il faut comprendre de quelle nécessité elles relèvent, et interpréter deux autres termes de même famille, au sens plus ou moins ambigu, le participe neutre pluriel ta dokounta (31, « les choses qui paraissent / apparaissent ») et l’adverbe dokimôs (32, « comme il convient », « honnêtement », dit le Bailly, « really », « genuinely », dit le LSJ [Liddell, Scott, Jones, Ancient Greek Lexicon ]). Valeur d’abord négative (tout cela n’est que semblant), et Parménide est toujours platonicien. Valeur d’abord positive ou, au moins, ambiguë (tout cela a l’éclat de la présence), et, loin de toute « pétition de platonisme », Parménide devient « authentiquement », c’est-à-dire à la fois nietzschéennement et heideggériennement, grec. Les dokounta baignent dans l’amour de la lumière de ce monde-ci : Beaufret va jusqu’à gloser avec insolence dokounta de la plus antiplatonicienne manière par « les choses mêmes » (p. 33). La clef du rapport alêtheia / dokounta tient tout entière, conclut-il, dans « la Différence ontologique qui est le lieu originel du Poème de Parménide » (p. 53), alêtheia pour dire l’être et son dévoilement, donation-retrait, dokounta pour dire les étants et leur (ap)paraître.

    Où l’on voit comment l’appréciation du sens et de la valeur de ces quelques mots implique une vision d’ensemble du poème, de son architecture et de ses articulations. On assiste même in vitro à la fabrication simultanée du texte et du sens : Parménide platonicien rationaliste, Parménide heideggérien." (pp. 18-19, une note omise)

  27. Cassin, Barbara, and Narcy, Michel. 1987. "Parménide sophiste: la citation aristotélicienne du fr. XVI." In Études sur Parménide. Tome II. Problèmes d'interprétation , edited by Aubenque, Pierre, 277-293. Paris: Vrin.

    ;"Certes, il peut paraître difficile de parler d'une exégèse d'Aristote à propos du fragment XVI, étant donné que les quatre vers sont cités sans commentaire, encadrés seulement d'autres citations. Mais c'est justement dans la façon dont sont présentées, agencées, ces citations, qu'il faut essayer de saisir l'interprétation." (p. 281)

  28. Castelnérac, Benoît. 2014. "Le Parménide de Platon et le Parménide de l’histoire." Dialogue. Canadian Philosophical Review no. 53:435-464.

    ;Résumé : "Cette étude se consacre à l’exergue méthodologique du Parménide où Parménide explique comment fonctionne l’enquête dialectique. Cette méthode reprend les indications que le Parménide historique prêtait à la déesse, une méthode d’enquête qui se déploie en «pensant la voie de l’être et la voie du non-être». Dans le Parménide, ces voies de la recherche sont présentées comme la manière d’examiner une hypothèse.

    Cette démarche prend des aspects d’exhaustivité : il faut se demander, en alternance et un grand nombre de fois, ce qu’il en découle si la chose en question existe ou si elle n’existe pas. Elle peut enfi n se distinguer des autres pratiques de la dialectique chez Platon."

  29. ———. 2015. "Note exégétique sur le fragment 2 de Parménide (DK 28 B 2)." Revue des Études Grecques no. 128:291-308.

    ;Résumé : "Cette analyse textuelle du fr. 2 de Parménide (DK 28 B2) a pour principal objectif de démontrer que le verbe νοῆσαι (l. 2) doit être lu comme un infinitif actif ayant pour complément les propositions subordonnées introduites respectivement par ὅπως à la li. 3 et ὡς à la li. 5. Il est en outre suggéré que le De arte (II, 1-2), du corpus hippocratique, ainsi qu’un passage du Parménide de Platon (136a-c) ont des points communs avec le fr. 2."

  30. Charles, Sébastien. 2001. "Du Parménide à Parménide." Les Études philosophiques no. 59:535-552.

    ;"Nous voilà parvenus à la fin de notre analyse. Nous croyons avoir bien montré en quoi le Poème de Parménide n’est pas d’ordre métaphysique mais ontologique(4) et cosmologique. Un tel travail de lecture attentive des textes peut bien entraîner une certaine déception car faire de Parménide un Présocratique avant tout, c’est lui faire perdre une dimension métaphysique dont l’histoire de la philosophie l’avait affublé et qui pouvait être, pour certains, à la source d’une véritable jouissance spéculative. Mais le travail philosophique se veut aussi effort critique pour nous débarrasser de nos illusions en général, et, parfois, de nos illusions philosophiques. Comme l’écrit André Comte-Sponville : « La vérité, pour le philosophe, prime sur le bonheur. Mieux vaut une vraie tristesse qu’une fausse joie5). » Mieux vaut un Parménide philosophe

    de la nature qu’un métaphysicien anachronique. Mais cela ne nous empêche pas de faire encore de Parménide l’objet de nos recherches car tout n’est pas dit. Comme l’écrit judicieusement Heidegger : « Le dialogue avec Parménide ne prend pas fin ; non seulement parce que, dans les fragments conservés de son Poème didactique, maintes choses demeurent obscures, mais aussi parce que ce qu’il dit mérite toujours d’être pensé. Mais que le dialogue soit sans fin n’est pas un défaut. C’est le signe de l’illimité qui, en soi et pour la pensée qui se souvient, préserve la possibilité d’un revirement du destin. »(6) La métaphysique

    a bel et bien une histoire, et cette histoire, pour nous, est toujours à faire ." (p. 552)

    (4) Une nouvelle fois nous rappelons ici notre distinction entre métaphysique et ontologie.

    Alors que l’ontologie se passe de principes transcendants (Idées, formes, etc.), la métaphysique recourt essentiellement à ce genre de concepts pour expliquer le réel. Parménide pense l’Être et non le Bien ou l’Acte pur...

    (5) André Comte-Sponville, L’amour, la solitude, Vénissieux, Paroles d’Aube, 1992, p. 11.

    (6) Heidegger, Essais et conférences , « Moira (Parménide, VIII, 34-41) », Paris, Gallimard, « Tel », 1993, p. 310.

  31. Collobert, Catherine. 1993. L'être de Parménide, ou le refus du temps . Paris: Kimé.

    ;Table des matières: Préface de Marcel Conche I-VI; Avant-propos 3; Le poème de Parménide 5; Sources 7; Texte et traduction 10; Introduction 27; Première partie: La parole: dire et penser 33;

    Chapitre 1: L'instauration de la parole: le chemin 35; Chapitre 2: Les chemins en question 73; Chapitre 3: L'indissolubilité du Dire et du Penser 101; Deuxième partie: Ontologie et temporalité 125; Chapitre 1: La sémantique de l'être 127; Chapitre 2: Genèse, destruction et temps 155; Chapitre 3: Les caractères et la présence permanence souveraine 197; Chapitre 4: L'étant, le non-étant et le temps 231; Conclusion 227; Bibliographie 281; Index des passages d'auteurs anciens 291; Index de noms 295-296.

    "Ce travail est né de la volonté de comprendre comment, dès son origine, la pensée de l'Être s'est constituée comme refus du temps, comment "être" a cessé de signifier "devenir".

    Avec Parménide, le discours philosophique, le logos, s'instaure comme parole métaphysique de l'être. L'être a pour corollaire essentiel et fondamental la négation du temps ; ce qui est dans le temps, n'est pas absolument. Vivant et mourant, nous sommes dans le non-être parménidien.

    La question initiale de ce travail est la suivante:

    comment Parménide, en posant que tout logos est logos de l'être, c'est-à-dire aussi que tout discours vrai est discours de l'être, a-t-il fermé les portes du logos au temps?

    Pour répondre à cette question, nous avons eu recours à une analyse structurelle du poème. Nous avons donc écouté la parole parménidienne par delà les vissicitudes historiques de ses différentes interprétations.

    Nous avons pensé que seule l'analyse de la construction du discours parménidien nous permettait d'entrer dans ce même discours pour en saisir toutes les difficultés et toutes ses richesses et pour tenter dans la mesure du possible de lever ces difficultés.

    Nous avons, par conséquent, voulu écouter Parménide et lui seul, parce que la réponse à notre question est dans sa seule pensée. Nous avons en effet, voulu comprendre de quelle manière il a réalisé le rejet du temps de la sphère de l'Être.

    La question du pourquoi aurait sans doute nécessité une autre méthode. Nous n'avons pas recherché les causes historiques de cette éviction du temps et de l'instauration du discours métaphysique.

    Nous avons voulu comprendre comment s'est établie la dissociation de l'être et du temps dans le discours original, c'est-à- dire dans la pensée parménidienne ; comment finalement Parménide a-t-il rendu possible la métaphysique ?

    Il fallait donc s'interroger sur la force et les ressorts de ce discours, qui a commandé, à certains égards, l'avenir de la philosophie. L'analyse de la logique gouvernant ce discours nous permettait d'accéder, selon nous, à la compréhension de la dissociation de l'être et du temps.

    C'est pourquoi, nous nous sommes abstenus d'expliquer Parménide à la lumière de Platon ou d'Aristote, ces derniers ne nous étant d'aucun secours pour répondre à notre question initiale. Il ne s'agissait pas, en effet, de lire Parménide au travers de sa postérité ou des problèmes qu'il a posés à cette même postérité - même si nous avons pu éclairer Parménide de certaines lumières platoniciennes ou aristotéliciennes, notamment concernant la question du temps. Mais il faut être extrêmement prudent sur les rapprochements historiques. Et cette prudence même aurait nécessité un tout autre travail." (pp. 3-4)

    "La traduction qui suit n'est pas le fruit d'un travail personnel en dehors de certains vers qui nous sont apparus déterminants pour notre interprétation, et pour lesquels nous avons cru bon de proposer notre propre traduction lorsque celle de D. O'Brien et de J. Frère ne nous satisfaisait pas. Nous nous sommes largement inspirés de leur commune traduction ainsi que de celles de L. Couloubaritsis et de N.L. Cordero. Cette traduction n'a par conséquent qu'une valeur d'outil de travail et se présente à cet égard comme le reflet de notre interprétation." (p. 9)

  32. Constantineau, Philippe. 1987. "La question de la vérité chez Parménide." Phoenix.Journal of the Classical Association of Canada no. 41:217-240.

    ;"Nous proposons, dans ce qui suit, une interprétation du fragment 2 dont la principale nouveauté réside dans le fait que nous partons de l'hypothèse que les propositions des vv. 3 et 5 constituent non pas des déclaratives, comme l'écrasante majorité des commentateurs l'ont cru jusqu'à présent, mais des interrogatives indirectes. En effet, rares ont été les commentateurs qui ont admis comme possible cette lecture et aucun ne l'a encore sérieusement défendue, comme si cela ne changeait pas grand-chose au sens de ces vers que l'on adopte l'une ou l'autre lecture.

    Nous croyons au contraire pouvoir démontrer que la lecture que nous proposons résout les principales difficultés auxquelles se butait l'interprétation traditionnelle et fait apparaître sous un jour nouveau le point de départ de l'ontologie parménidienne." (pp. 218-219)

    (...)

    "La raison de la disqualification par Parménide des propositions existentielles usuelles tient à la compréhension restrictive, qui se veut d'ailleurs conséquente, voire littérale, qu'il fait de ce qu'implique la question qui demande ὄντως ἔστιν. En effet, pour Parménide, "ce qui est" ou l'étant, cela vaut dire d'emblée la totalité de ce qui existe (cf. fr. 8,3-5) et non pas tel ou tel objet particulier. Il suit de cette compréhension restrictive de la question de la Vérité que tout discours sur les "formes" autres que l'étant comme tel, y inclus les propositions usuelles d'existence, se trouve ravalé par Parménide au rang d'opinions," (p. 240)

  33. Cordero, Néstor-Luis. 1977. "Analyse de l'édition Aldine du commentaire de Simplicius à la Physique d'Aristote." Hermes.Zeitschrift für Klassische Philologie no. 105:42-54.

    ;Repris dans N.-L. Cordero, Parmenidea. Venti scritti sull'Eleate i i suoi "eredi" , Baden-Baden; Academia Verlag 2019, pp. 37-48.

    "Tout porte a croire, par consequent, que 1'édition de Simplicius de 1526 a eté effectuée sous la responsabilité de Francesco d'Asola, dont les conjectures, en general, n'ont pas été tellement heureuses. Cependant, nous devons reconnaitre une fois de plus que nous nous trouvons sur le plan des conjectures et que la possibilité - lointaine, certes - n'est pas exclue que Francesco d'Asola ait disposé de l'archetype de l'oeuvre de Simplicius. Toutefois, nous pouvons constater que les manuscrits conserves actuellement presentent le même texte que E et F et, par consequent, ne justifient pas quelques conjectures « trop hardies »." (p 54)

  34. ———. 1979. "Les deux chemins de Parménide dans les fragments 6 et 7." Phronesis.A Journal for Ancient Philosophy no. 24:1-32.

    ;"Nous avions dit qu'à 6.1-2 il était question du premier chemin de la recherche, et qu'à 6.4 sq. nous trouvions un exposé concernant le second chemin. Selon l'invitation de la Déesse, l'élève doit apprendre les deux chemins; or, il doit commencer par ce premier chemin ( exposé a 6.1-2), et après il doit continuer par le second chemin, cette impasse par laquelle déambulent les hommes qui ne savent rien. Toutefois, selon les thèses présentées au fr. 2, il suffit d'énoncer un chemin pour se rendre compte que le chemin contradictoire n'est pas possible, car s'il n'y a que de l'être, il est évident que le non-être n'existe pas. C'est ainsi que le point du départ est double, et telle est la signification de l'énigmatique fr. 5: Ξυνὸν δὲ μοί ἐστιν, ὁππόθεν ἄρξωμαι· τόθι γὰρ πάλιν ἵξομαι αὖθις.. Ici c'est la Déesse qui expose son (μοι) point de vue, et, pour elle, le point du départ est commun (ξυνός,). A partir (όππόθεν)(151) de ce point ξυνός, elle commence (άρχομαι) son raisonnement. Mais tandis que pour la Déesse le point du départ est commun, l'élève doit commencer par un chemin et ensuite(152) il doit commencer par un autre. Pour cette raison, lorsque la Déesse termine son exposé du premier chemin, elle signale: "ici je termine pour toi (σοι) le raisonnement et la pensée à propos de la Vérité" (8.50-51 ); et elle commence ensuite (δ' ἀπὸ τοῦδε) l'enseignement des opinions des mortels, exposé par l'intermédiaire d'une "trompeuse distribution de mots" (8.52)." (p. 23)

    (151) Etym. Mag . p. 611; Etym. Gr. Ling ., p. 416; Hesychius, Lex., III, p. 173.

    (152) Il faut signaler que la corrélation ρώτης γάρ ... αὐτὰρ ἔπειτα (6.3-4) n'a pas sens adversatif, comme le font ressortir la plupart des traductions, mais simplément corrélatif.

  35. ———. 1982. "La version de Joseph Scaliger du Poème de Parménide." Hermes.Zeitschrift für Klassische Philologie :391-398.

    ;Repris dans N.-L. Cordero, Parmenidea. Venti scritti sull'Eleate i i suoi "eredi" , Baden-Baden; Academia Verlag 2019, pp. 69-76.

    "La plupart des livres des grands philosophes et de leurs commentateurs voient la lumière aux XVe et XVIe siècles, et a l'interieur de ce précieux corpus les philologues commencent à décéler des noms presqu'inconnus,

    des citations d'ouvrages déjà perdus, dont la reconstitution, à partir de fragments isolés, devient pour certains erudits une veritable et souhaitable obsession.

    Un des resultats les plus heureux de cette passion est la reconstitution presque complete, vers la fin du XVIe siecle, du Poème de Parménide. L'auteur de cette authentique prouesse - car il a reussi a recueillir cent quarante huit des cent soixante vers attribués aujourd'hui a Parménide(3) - fut le philologue français Joseph J. Scaliger.

    L'excellente reconstitution de Scaliger du Poèeme de Parménide n'eut qu'un seul defaut: elle n'a jamais été publiée." (p. 392)

    (...)

    "Dans son testament, Scaliger leguait a l'Universite de Leiden tous ces livres et ses ecrits, et dans un catalogue de l'annee 1612 figure déjà une liste du "fonds Scaliger" (pp. 79-88). Le manuscrit que nous presentons ne constitua pas une exception: dans cet ancien catalogue on lui attribua le code '14'." (p. 395)

    (...)

    "Nous rappelons que dans la version de Scaliger manquent les Fr. 3, 5, 11, 19, et les vers 31 -32 du Fr. 1 (c'est-a-dire, douze vers). Son texte des Fr. 4, 9, 13, 14 et 15 ne differe pas de celui presente par Diels-Kranz. L'ordre des fragments chez Scaliger, enfin, était le suivant: Fr. 1 (1 -30), 7 (2- 6), 8,9, 12,2,6, 13, 15, 14,7(1-2), 17,4, 10, 16et 18." (p. 398)

  36. ———. 1982. "Le vers 1, 3 de Parménide ("la Dèesse conduit à l'égard du tout")." Revue Philosophique de la France et de l'Étranger :159-179.

    ;Repris dans N.-L. Cordero, Parmenidea. Venti scritti sull'Eleate i i suoi "eredi" , Baden-Baden; Academia Verlag 2019, pp. 77-96.

    "La seule source du vers 1.3 est l'Adv. Math . de Sextus Empiricus et, dans la plupart des éditions de ce texte publiées après 1912, nous lisons quel' « homme qui sait» a été conduit jusqu'à la demeure de la Déesse « à travers toutes les villes » (κατὰ πάντ' ἄστη). Bien que dans le contexte de la philosophie de Parménide, cette formule ait toujours semblé douteuse, il est probable que beaucoup d'érudits importants l'ont conservée parce qu'elle se trouvait - croyaient-ils - au moins dans un manuscrit de l'oeuvre de Sextus, et que son rythme respectait fidèlement celui de l'hexamètre parménidien.

    Mais, dans ces dernières années, le texte de Sextus a subi de nouveaux examens, et dans le cas précis de la citation parménidienne, A. H. Coxon a fait une découverte éclairante : la version κατὰ πάντ' ἄστη que nous citions ci-dessus n'est qu'une fausse lecture du cod. N (Laur. Gr. 85.19) par H. Mutschmann.

    Cependant, il reste encore beaucoup à dire en ce qui concerne le vers 1.3 de Parménide car, quoique la critique de Coxon ouvre la voie à des nouvelles enquêtes, elle n'apporte pas une solution définitive pour ce passage. C'est pour cette raison que notre tâche consistera à proposer une nouvelle conjecture pour le vers 1.3, même si nous risquons d'ajouter encore une interprétation aux « innombrables conjectures» dont se plaignait déjà H. Diels en 1897 et qui, comme nous le voyons aujourd'hui, étaient loin d'épuiser toutes les possibilités offertes par le texte de Sextus." (pp. 159-160, notes omises)

  37. ———. 1984. Les deux chemins de Parménide . Paris: Vrin.

    ;Édition critique, traduction, études et bibliographie.

    Deuxième édition corrigée et augmentée 1997.

    Table des matières: Introduction IX-XIV; Introduction à la 2e édition 1; Parite I: Le Poème de Parménide. A. Sources 17; B. Texte 29; Addenda et corrigenda 34; C. Traduction 35; Partie II: Études critiques. Chapitre I: Analyse de la présentation des deux chemins de la recherche dans le fr. 2 45; Chapitre II: Le contenu des deux thèses du fr. 2 73; Chapitre III: Les deux chemins dans les fragments 6,7 et 8,34-7 110; Chapitre IV: L'Alétheia, la Doxa, et la portée de l'enseignement parménidien 176; Appendice I: La signifcation du verbe einai dans la littérature préparménidienne. La racine indoéuropéenne. Le Lexicon d'Ebeling. La thèse de Ch. H. Kahn. Les trois nuances d' einai exemplifiées par trois utilisations différentes 215; Appendice II: La tradition manuscrite du vers 6,3. List de manuscrits qui contiennent le vers 6,3. Les variations du texte 234; Parte III: Bibliographie parménidienne 237; Table analytique des matières 301-302.

    "Nous ne prétendons pas avoir trouvé la solution, c'est-à dire le point de vue à partir duquel la philosophie de Parménide révélera la clé de sa fertilité. L'état fragmentaire dans lequel nous est parvenu son Poème nous place en état d'infériorité par rapport aux penseurs classiques pour émettre un jugement sur la totalité de son oeuvre. C'est pour cela que nous avons préféré limiter notre étude à un seul problème. Toutefois, nous avons choisi un problème qui, à notre avis, occupe une place de choix dans les fragments du Poème que nous possédons actuellement: le problème des chemins de la connaissance, des voies de la recherche. (...)

    Pour atteindre cet objectif, nous proposons d'analyser certains éléments généralement admis dans la pensée de Parménide, mais qui, dans la plupart des cas, ne sont pas poursuivis jusqu'à leurs conséquences extrêmes. (...)

    La quasi totalité des chercheurs qui se sont intéressés à la philosophie de Parménide s'accordent sur le fait que sa pensée est structurée autour du principe de la non - contradiction (8). Nous n'affirmons pas ni ne nions pour autant que Parménide ait "inventé" ce principe, ni qu'il ait eu conscience de son utilisation, mais il ne faut pas oublier que le principe du tiers exclu apparaît également chez Parménide - principe qui renforce celui de la non-contradiction et rend contradictoires toutes les oppositions que nous rencontrons tout au long de son Poème. Sur la base de cette constatation, dont nous fournirons des exemples tout au long de notre travail, nous trouvons chez Parménide un dualisme méthodologique rigoureux qui sépare, "comme d'un coup de hache", l'espace conceptuel, ainsi que l'a remarqué P.M. Schuhl à juste titre (10), en deux régions opposées. Cette dichotome, véritable transposition sur le plan philosophique de la bifurcation mystique que nous trouvons dans les récits orphiques et pythagoriciens (11), constitue, à notre avis, la structure primordiale du raisonnement parménidien. C'est à cette dichotomie qu' obéit la présentation de son enseignement sous la forme de deux thèses contradictoires: les deux chemins de la recherche.

    Notre analyse cherchera à établir le contenu de ces thèses contradictoires ainsi que leur portée, c'est-à-dire le domaine auquel elles s'appliquent et les conséquences qui dérivent de leur acceptation rigoureuse (12). Nous partirons pour cela du fr. 2, où apparaît la première énonciation des "deux seuls chemins de la recherche", et, une fois établie la valeur des deux thèses, nous étudierons leur réapparition (reliée à des problèmes différents) dans les fr. 6, 7 et 8. Ensuite, nous tenterons de découvrir quelques correspondances possibles entre ces chemins de la recherche et le récit mythique du voyage entrepris par le poète-philosophe, tel qu'il figure dans le fr. 1. Enfin, nous analyserons la nouveauté que présente le système de Parménide par rapport à la pensée de ses prédécesseurs.

    En ce qui concerne notre méthode, enfin, il y a deux constatations que le lecteur ne pourra pas s'empêcher de faire. La première, qui sera reçue avec un certain soulagement, concerne le fait que notre travail semble se terminer à la page 214. Cela obéit, d'une part, à notre intention de grouper dans deux Appendices l'analyse de certains éléments qui renforcent notre recherche, mais dont l'insertion dans les chapitres correspondants aurait, à notre avis, nui à la continuité du discours, et, d'autre part, à la présentation, dans cet ouvrage, de la Bibliographie Parménidienne.

    La deuxième constatation concerne l'abondance - l'excès parfois - de questions dites "philologiques" dans un travail qui, comme le nôtre, se voudrait proche du domaine de la "philosophie". La raison en est simple: nous croyons que dans le domaine des études classiques, une collaboration étroite, voire une symbiose, entre philologie et philosophie s'impose. Nous n'hésitons pas à affirmer que, en ce qui concerne la pensée antique, la philosophie sans philologie est aveugle, de même que la philologie sans philosophie est vide. Sans son support réel, c'est-à-dire les mots et la science qui s'en occupe, les spéculations philosophiques ne sont que tâtonnements; mais les mots, isolés du système conceptuel dont ils sont issus, ne sont que "paroles trompeuses", comme dit Parménide lui-même." (Introduction pp. X-XIII)

    8. Cf. K. Reinhardt (1916), p. 56, et J. Mansfeld (1964), p. 57, n. 3.

    9. Cf. notamment 8,16 et 8,36-7.

    10. P.M. Schuhl essai sur la formation de la pensée grecque (1949), p. 284.

    11. Cf. Idem, p. 285.

    12. Parmi ces conséquences, la principale est le rejet, en tant que "chemin de recherche", du prétendu "troisième chemin" du fr. 6.

  38. ———. 1985. "Les sources vénitiennes de l'édition Aldine du Livre I du Commentaire de Simplicius sur la Physique d'Aristote." Revue internationale des études relatives aux manuscrits médiévaux no. 39:70-88.

    ;Repris dans N.-L. Cordero, Parmenidea. Venti scritti sull'Eleate i i suoi "eredi" , Baden-Baden; Academia Verlag 2019, pp. 49-68.

    "Même si, ces dernières années, les progrès ont été presque nuls dans l'étude des techniques et de la méthode des éditions d'Alde Manuce, ainsi que dans l'identification des manuscrits dont il s'est servi pour l'édition du Commentaire de Simplicius sur la Physique d'Aristote, la récente parution de certains documents concernant les bibliothèques vénitiennes vers la fin du XVe et le début du XVIe siècle nous permet d'envisager notre tâche avec de nouvelles précisions. Nous ne croyons pas pour autant avoir trouvé une solution définitive à notre problème, mais nous pouvons avouer que les inconnues dans notre recherche ont maintenant presque entièrement disparu." (p. 70)

  39. ———. 1987. "L'histoire du texte de Parménide." In Études sur Parménide. Tome II. Problèmes d'interprétation , edited by Aubenque, Pierre, 3-24. Paris: Vrin.

    ;Repris dans N.-L. Cordero, Parmenidea. Venti scritti sull'Eleate i i suoi "eredi" , Baden-Baden; Academia Verlag 2019, pp. 16-36.

    "Nous sommes condamnés aujourd’hui à ne posséder qu’un schéma très partiel et mutilé de sa philosophie, si puissante et polémique(7). Il nous est parvenu toute une série de fragments d’un poème à caractère philosophique8 attribuée depuis l’antiquité à Parménide (voir l’appendice B à la fin de cet article). Tous ces fragments appartiennent-ils à un seul ouvrage9, Trouvons-nous à l’intérieur de ces fragments le noyau central de la pensée de Parménide?(10). Nous n’en aurons jamais la certitude totale. En outre, et comme complication supplémentaire, Platon fait allusion à l’enseignement “en prose” (πεζή)(11) de Parménide. Cet enseignement était-il oral ou écrit? Nous ne pouvons pas le savoir. Il n’y a qu’une réalité: une certaine quantité de vers - groupés ou isolés - écrits vers le début du Ve siècle par Parménide, à partir desquels, à un moment donné, des érudits ont essayé de reconstituer le Poème originel. Les péripéties de la découverte de ces fragments et des essais de reconstitution du texte de Parménide constituent le domaine auquel nous faisons allusion lorsque nous parlons de “l’histoire du texte de Parménide”." (pp. 3-4)

    (...)

    "A partir de la 5e édition de Die Fragmente der Vorsokratiker (1934/7), la responsabilité du travail appartient à W. Kranz, (qui était responsable depuis 1910 d’un volume contenant le Wortindex ). Kranz modifia encore une fois quelques leçons, la traduction, et l’ordre des fragments(76). La 6e édition (1951), enfin, reproduit le texte de la 5e et ajoute un “Nachtrag” détaillé. Toutes les éditions qui paraîront après 1951 ne sont que reproductions photomécaniques de la 6e édition.

    Cette version du Poème de Parménide est devenue orthodoxe. Elle est souvent reproduite, et la plupart des érudits, même les plus compétentes, lui font confiance. Il n’y a que quelques auteurs qui aient proposé de légères modifications, toutes basées sur l’apparat présenté par Diels-Kranz. Cet apparat, pourtant, n’est pas exempt d’erreurs (nous en signalons quelques exemples dans l’“Appendice A”). Nous estimons, en conclusion, que cette version “orthodoxe” doit être modifiée en profondeur, à partir des éléments fournis par une nouvelle analyse des sources manuscrites du texte de Parménide(77)." (p. 24)

    Appendice A: Sur la version de Diels-Kranz du Poème de Parménide: a) L'évolution (pp. 18-19); b) Quelques erreurs (pp. 19-24);

    Appendice B: Les sources du texte de Parménide (pp. 22-24)

    (7) Sur l’aspect “contestataire” du Poème de Parménide par rapport aux philosophes précédents, cf. notre travail Les deux chemins de Parménide , Paris-Bruxelles, 2e éd. 1997, pp. 197-8.

    (76) Dans [’“Appendice A” nous signalons les différents changements effectués par Diels-Kranz dans leur version entre 1897 et 1937.

    (77) Nous avons présenté un texte critique correspondant à l'état actuel des éditions des auteurs-sources, aussi qu’à nos recherches personnelles, dans notre ouvrage Les deux chemins de Parménide (Vrin-Ousia, Paris-Bruxelles, 1984; 2e éd. 1997). Voir aussi nos contributions dans “Les deux chemins de Parménide dans les fragments 6 et 7” (Phronesis , 24, 1979, pp. 1-32) et “Le vers 1.3 de Parménide (‘La déesse conduit à l’égard de tout’)”, Revue Philosophique , 1982, 2, pp. 159-179.

  40. ———. 1987. "Simplicius et l'«école» élèate." In Simplicius. Sa vie, son oeuvre, sa survie , edited by Hadot, Ilsetraut, 166-182. Berlin: de Gruyter.

    ;Repris dans N.-L. Cordero, Parmenidea. Venti scritti sull'Eleate i i suoi "eredi" , Baden-Baden; Academia Verlag 2019, pp. 214-227.

    "En effet, il est trèsprobable que l'école éleate n'ait jamais existé. II est très probable que les éleates, en tant que mouvement philosophique, n'aient jamais existé. Mais, dans ce cas lä, il aurait fallu les inventer, car ce concept, comme celui de Dieu, permet de resoudre toute une serie de problèmes.

    II a permis, surtout, de mener ä bien une classification par rapport à laquelle les systèmes de Piaton et d'Aristote se sont placés et ont dessiné ses limites, ce qui n'est pas une petite affaire. En effet, c'est grâce ä des schemas clairs et distincts, qui ont coulé dans des moules acceptables, c'est-ä-dire comprehensibles, des systèmes parfois très eloignés des interets de ces penseurs plutöt «primitifs», que seraient les resocratiques, que la métaphysique et l'ontologie occidentales ont pu avancer. Et l'«école éleate» est l'un de ces moules, l'un de ces casiers. Voilä pourquoi, si l'école éleate n'a peut-etre pas existé, il aurait fallu l'inventer.

    Le titre de notre travail fait allusion ä Simplicius et l'«école» éleate, mais nous ne pouvons pas oublier que Simplicius utilise un schema qu'il reproduit, plus ou moins fidèlement — comme nous le verrons; aussi ne sera-t-il pas inutile de porter notre réflexion sur la réalité historique de ce qu'on appelle «école éleate», sur sa genèse, ses integrants et ses caractéristiques." (p. 166)

  41. ———. 1990. "La Déesse de Parménide, maîtresse de philosophie." In La naissance de la raison en Grèce. Actes du Congrès de Nice, mai 1987 , edited by Mattéi, Jean-FRançois, 207-214. Paris: Presses Universitaires de France.

    ;Repris dans N.-L. Cordero, Parmenidea. Venti scritti sull'Eleate i i suoi "eredi" , Baden-Baden; Academia Verlag 2019, pp. 110-117.

    "Un siècle et demi après Hésiode, mais presque au même temps qu'Eschyle et que Pindare, Parménide partage encore cet univers. Dans l'histoire qu'il nous raconte, il y a quelqu'un qui s'adresse à une déesse. Il ne l'invoque pas, mais il fait un voyage pour la rencontrer, et ce voyage est très certainement initiatiques. Et lorsque le voyageur arrive au domaine de la déesse, celle-ci qui, comme la théa du début de l'Iliade , est anonyme parle. Comme toutes les déesses que nous venons de mentionner, elle dit la Vérité, et exhorte son élève à écouter son mythos : «Eh bien : je dirai, et toi, qui écoutes, accueille mon mythos » (fr. 2. 1).

    Jusqu'ici, rien de nouveau. La Déesse parménidienne n'a rien de particulier. Mais une fois exposés (au fr. 2) les principes de sa Vérité -- c'est-à- dire les axiomes desquels découlent les affirmations qui constitueront un véritable "système" la Déesse s'engage dans une révolution copernicienne. Elle, qui est une Déesse, se sécularise, et, d'une manière inattendue, demande à son élève : "Juge avec le logos la preuve très polémique que je viens d'énoncer" (fr. 7.5-6). Etonnante formule dans la bouche d'une déesse, que cet appel à son élève afin qu'il examine son message avec le logos! Il est probable que la philosophie, comme recherche du principe de toutes les choses, est née le 28 mai 585 (8), lorsque l'éclipse que Thalès avait prédite a eu la gentillesse de ne pas manquer au rendez-vous; mais nous n'hésitons pas à affirmer que la philosophie, en tant que critique argumentée des idées reçues, c'est-à-dire comme dialogue didactique entre la Vérité et la pensée qui l'interroge, est née en ce jour du début du Ve siècle, quand Parménide écrivit -- ou récita -- les mots que nous venons de citer. Notre affirmation peut paraître surprenante. Il est indéniable, néanmoins, que dans cette formule nous trouvons pour la première fois une invitation -- même une incitation -- adressée par un maître à son élève, afin que celui-ci joue un rôle actif dans la recherche de la vérité. Mais nous devons justifier notre enthousiasme, et le meilleur moyen est l'analyse détaillée des vers 5 et 6 du fragment 7 de Parménide." (pp. 208-209)

    (8) W. K. C. Guthrie, A Hislory of Greck Philosophy , I, Cambridge, 1962, p. 6.

  42. ———. 1991. "L'invention de l'école Éléatique: Platon, Soph. 242d." In Études sur le Sophiste de Platon , edited by Aubenque, Pierre and Michel, Narcy, 91-124. Napoli: Bibliopolis.

    ;Repris dans N.-L. Cordero, Parmenidea. Venti scritti sull'Eleate i i suoi "eredi" , Baden-Baden; Academia Verlag 2019, pp. 194-213.

    "La "philosophie éléatique" est devenue ensuite l'un des clichés dont les commentateurs dans un premier temps, et les historiens de la philosophie après, n'ont pas pu se passer. Nous voudrions analyser dans ce travail le rapport qui pourrait s'établir entre les deux philosophes nés à Elée ("éléates", donc) et le "système éléatique"(5) tel qu'il a été canonisé par Platon dans le Sophiste .

    «Pour ce qui est de notre gent (ethnos ) éléatique, qui part de Xénophane et de plus haut encore» (tr. L. Robin), elle «ne voit qu'unité dans ce qu'on nomme le Tout» (tr. A. Diès) (Soph . 242 D). Lorsque Platon écrivait ce passage du Sophiste qui constitue la première "histoire de la philosophie" que nous connaissons(6) - pouvait-il imaginer qu'il venait de signer l'acte de naissance de l'école éléatique? Probablement pas, mais comme sa· systématisation permettait à la fois de "clarifier" la complexité de la pensée parménidienne et de placer le «vénérable et redoutable» Parménide (Theaet . 183 E) parmi des collègues plus facilement critiquables, la formule eut un succès retentissant.

    Mais il faut justifier ces appréciations, et le point de départ le plus approprié est l'analyse du passage platonicien." (p. 94)

    (...)

    "Dans le Sophiste, Platon doit se libérer d'une certaine conception de l'être: celle qu'il avait affirmée jusqu'aux dialogues de la période des "critiques". Le Parménide règle les comptes avec la théorie des Formes, mais surtout en ce qui concerne le rapport entre celles-ci et les individus. Dans le Sophiste, c'est la structure même de !'univers des Formes, ainsi que la constitution de chaque Forme, qui est en question. Jusqu'au Sophiste, l'héritage du père Parménide était la source de l'univers des Formes. La nouvelle conception du παντελῶς ον, en revanche, exige le parricide.

    Mais Platon, qui se considérait jusqu'alors comme un parménidien lui-même, est certain que les conceptions de Parménide ont dépassé la personne du Maître et sont à la base d'un mouvement qui montre - enfin! - ses faiblesses chez !"'élève" Mélissos. En fin de compte, Parménide n'était qu'un moniste, dit Platon. Il devient ainsi la figure centrale d'un groupe qui «ne voyait que l'unité dans ce qu'on nomme le Tout», dont le représentant le plus récent, Mélissos, propose une version ad usum Delphini du système. L'école d'Elée, devenue un cliché, est une généralisation didactique utile, profitable. Mais elle possède autant de réalité historique que la très belle "Ecole d'Athènes" de Raphaël.

    (5) 5 Nous appelons conventionnellement "éléates" les habitants d'Elée et "éléatique" tout ce qui concerne l'école ou le système philosophique qui serait né à Elée.

    6 Cfr. F. Chiereghin, Implicazioni etiche della storiografîa filosofîca di Platone , Padova 1976, ch. III, passim .

  43. ———. 1994. "Parménide : la "rhétorique" de la déesse." In La rhétorique grecque. Actes du Colloque 'Octave Navarre' : troisième Colloque international sur la pensée antique organisé par le CRHI les 17, 18 et 19 décembre 1992 à la Faculté des Lettres de Nice edited by Galy, Jean-Michel and Thivel, Antoine, 53-62. Nice: Association des publications de la Faculté des lettres de Nice.

    ;Repris dans N.-L. Cordero, Parmenidea. Venti scritti sull'Eleate i i suoi "eredi" , Baden-Baden; Academia Verlag 2019, pp. 118-125.

  44. ———. 2000. "Parménide platonisé : à propos du 'Parménide' de Marcel Conche." Revue de Philosophie Ancienne no. 18:15-24.

    ;Repris dans N.-L. Cordero, Parmenidea. Venti scritti sull'Eleate i i suoi "eredi" , Baden-Baden; Academia Verlag 2019, pp. 135-141.

  45. ———. 2004. "La pensée s'exprime 'grâce' à l'être: Parménide, fr. 8, 35." Revue Philosophique de la France et de l'Étranger no. 129:5-13.

    ;"En effet : Parménide est très cohérent : étant donné la priorité qu’il a accordée au fait d’être, le penser s’exprime ép’eónti, c’est-à-dire, « grâce » (ou « à cause de » : epí n’abandonne jamais son pouvoir causal) à ce qui est. La formule eph’hôi , que nous proposons d’adopter, consacre ce principe au beau milieu de l’exposé des sémata de ce qui est, dans le long fragment 8. Et, à la ligne suivante, Parménide exprime la même idée, mais d’une manière négative :sans ce qui est (áneu(1) toû eóntos), le penser n’existe pas. Voici donc le sens du passage 8.34-6 : « Penser et ce pour quoi la pensée est, sont la même chose ; car sans ce qui est, grâce auquel il est énoncé, tu ne trouveras pas le penser. » Le penser n’existe que lorsqu’il exprime quelque chose sur ce qui est en train d’être. Et comme « il n’y a pas, et il n’y aura pas, autre chose que ce qui est » (8 .36 b-7), la pensée n’a qu’un seul objet : ce qui est. Lorsque ce qui est est absent de la pensée ou du dire, il n’y a que des « mots » trompeurs (8 . 52), des opinions vides." (p. 13)

    (1) Áneu , en tant que privation, est l’expression contraire à epí.

  46. ———. 2004. "Le logos comme critère chez Parmènide." In Cosmos et psychè. Mélanges offerts à Jean Frère , edited by Vegleris, Eugènie, 45-54. Hildesheim: Georg Olms.

    ;Repris dans N.-L. Cordero, Parmenidea. Venti scritti sull'Eleate i i suoi "eredi" , Baden-Baden; Academia Verlag 2019, pp. 126-134.

  47. ———. 2006. "Pour en finir avec la "troisième voie" chez Parménide." Elenchos no. 27:5-33.

    ;"Parler de "voies de la recherche" chez Parménide est non seulement naturel, mais aussi légitime. En effet, il est tout à fait naturel de parler de ces voies car Parménide lui-même en parle, et il est légitime de le faire parce que Parménide affirme, dans le texte connu aujourd’hui comme "fragment 1", que celui qui entreprend le chemin du savoir a le "droit" à l’ouverture des portes de la connaissance. Ce n’est pas le fruit du hasard que soit Diké, la déesse du droit, qui détienne les clés qui ouvrent la voie du chemin de la vérité, et que soit elle qui permet ainsi d’entreprendre la recherche qui conduira vers la découverte de l’être. En revanche, parler d’un problème concernant ces voies de recherche est à la fois artificiel (c’est-à-dire, non naturel) et illégitime, car ce problème n’existe pas dans la philosophie de Parménide. Il s’agit d’une invention des commentateurs, et même des commentateurs qui s’étalent dans le temps dans une période très restreinte, car Parménide a écrit son texte il y a au moins vingt-cinq siècles, et ledit problème est né il y a à peine un siècle et demi, et même moins. On pourrait soutenir que la tradition philosophique s’est trompée, et même que les commentateurs anciens sont restés aveugles et sourds face à ce qui était évident. Ce n’est pas impossible. Mais on peut affirmer aussi que notre post-modernité a une tendance naturelle à compliquer ce qui, en soi, était presque banal, et qu’elle exige des gens du passé qui s’expriment au présent. Les intellectuels ont l’habitude de parler d’une "récupération" du passé. Nous préférons la catégorie de "tergiversation". Regardons à ce propos le cas de Parménide." (p. 5)

  48. ———. 2010. Gianfrancesco d'Asola, le "créateur" de la troisième voie de Parménide .

    ;Celtic Conference in Classics - The Second Conference of the International Association for Presocratic

    Studies, University of Edinburgh 28-31 July 2010. (inédit, disponible sur academia.edu).

    "Notre travail a un seul but: inviter (et même inciter) les chercheurs intéressés à la philosophie de Parménide à revenir au passé, car la seule justification de l'existence d'une éventuelle troisième voie de recherche est la conséquence d'un verbe introduit en 1526 par l'éditeur Gianfrancesco d'Asola pour combler une lacune existante dans les manuscrits qu'il avait utilisé lorsqu'il s'est occupé d'imprimer le Commentaire de Simplicius à la "Physique" d'Aristote, seule source du fr. 6 de Parménide. La meilleur manière de revenir au passé consiste à interpréter la philosophie de Parménide sans tenir compte de la conjecture proposé par d'Asola, et respecter, en ce qui concerne le vers 6.3, son état lacunaire." (p. 5)

  49. ———. 2011. "La “Doxa des mortels” n’est pas la “physique” de Parménide." In Ontologia scienza mito. Per una nuova lettura di Parmenide , edited by Ruggiu, Luigi and Natali, Carlo, 81-90. Milano-Udine.

    ;Repris dans N.-L. Cordero, Parmenidea. Venti scritti sull'Eleate i i suoi "eredi" , Baden-Baden; Academia Verlag 2019, pp. 181-189.

  50. ———. 2012. "“Être” (et non “L’Être”) chez Parménide." In Λόγον διδόναι. La filosofia come esercizio del render ragione. Studi in onore di Giovanni Casertano , edited by Palumbo, Lidia, 107-114. Loffredo: Napoli.

    ;"Nous voyons aujourd’hui que le rapport qu’il y a entre les textes conservés (les “fragments”) des Présocratiques les plus éminents, Héraclite et Parménide, et l’interprétation platonicienne et aristotélicienne, n’est – comme on dit dans certains films – qu’une pure coïncidence.

    Il semble évident qu’aussi bien Platon comme Aristote possédaient le texte intégral des deux philosophes, mais quand ils commentent les passages que, heureusement, nous conservons encore aujourd’hui (par exemple, les vers 8.43-4 de Parménide sur l’image de la sphère, en ce qui concerne Platon(5), ainsi que l’interprétation aristotélicienne des vers 8.55-9, où le Stagirite se permet de parler de “principes”, ἀρχαὶ, chez Parménide, le froid et le chaud(6), nous voyons qu’il s’agit d’une véritable entreprise de désinformation, car ils adaptent ces textes à leurs propres recherches." (pp. 108-109)

    (...)

    "L’origine des trois prétendues propriétés de l’Être (unité, immobilité, sphéricité) est facile à trouver: depuis l’Antiquité on a parle de “L’Être” de Parménide, c’est à dire, d’un verbe substantivé, comme traduction, dans toutes les langues, de la formule parménidienne τὸ ἐὸν. Le verbe “être”, “substantialisé”, c’est à dire, devenu un substantif, “L’Être”, peut être envisagé comme une substance, susceptible d’être une ou multiple, immobile ou en mouvement, et sphérique ou cubique.

    Mais la nouveauté introduite par Parménide dans le domaine de la philosophie (nouveauté que Platon semble découvrir tardivement, lors de l’écriture du Sophiste ; je reviendrai sur ce point), a consisté à découvrir que, s’il a des entités “substantielles”, ou, si l’on préfère, des “étants”, c’est parce qu’il y a de l’être. Et son Poème est une (dé)monstration passionnée du caractère nécessaire (car il est impossible de ne pas être: fr. 2.3) et absolu (car il n’y a pas des étants qui ne soient pas: fr. 7.1) du fait d’être. Le participe, parfois substantivé, (τὸ) ἐὸν, est une nuance grammaticale de la thèse centrale du Poème, qui est une analyse de l’infinitif εῑναι, nuance qui permettra de faire allusion a tous les “étants” (τά ἐόντα) moyennant un singulier général ou générique, (τὸ) ἐὸν, et ceci pour la première fois dans un texte philosophique." (p. 109)

    (...)

    "Les mortels ne mélangent pas deux “entités”, l’Être et le Non-Être, comme on dit presque toujours, mais deux “états”: le fait d’exister et le fait de ne pas exister." (p. 110)

    (...)

    "N’oublions pas que Platon, presque son contemporain, n’a pas hésité à écrire que «je crains ne pas comprendre ce que lui [Parménide] a dit, et, plus encore, que le sens de sa pensé nous échappe»(15). Il y a à cet égard un fait très curieux: le texte que nous appelons aujourd’hui “fragment 2”, qui présente les seules voies de recherche que l’on peut imaginer (dont l’une sera supprimée), et qui expose les véritables axiomes sur lesquels s’appuie toute la philosophie de Parménide (grosso modo : il y a de l’être; ne pas être n’est pas possible) n’a été cité par des “collègues” philosophes, Proclus et Simplicius, que plus d’un millénaire après son écriture. Ce texte fondamental semble ne pas avoir été l’objet d’un intérêt particulier de la part de Platon, d’Aristote, de Plutarque, ni de personne, peut être parce que Parménide n’avait pas accompagné sa découverte du fait d’être d’une assimilation de celui-ci à des étants privilégiés (eau, feu, atomes, Formes, etc.), comme c’était le cas des autres philosophes." (pp.112-113)

    (5) Sophiste , 244e.

    (6) Aristote, Métaphysique, 986b33.

    (15) Platon, Théétète , 184a.

  51. ———. 2015. "L'insoutenable poids des 'absences' dans l'interprétation parméndienne de Casertano." In Eleatica Vol. 4: Da Parmenide di Elea al Parmenide di Platone , edited by Gambetti, Francesca and Giombini, Stefania, 129-135. Sank Augustin: Academia Verlag.

    ;"Or, la nouveauté de Parménide, laissée de côté par Casertano, c'est l’utilisation, pour la première fois, du singulier, το έόν. Or, si Parménide a introduit cette nouveauté c’est pour se séparer de ses collègues (tout en restant un ‘physicien’) et pour souligner que, comme πάντα τα όντα ont en commun 'le fait d'être' - on reviendra sur cette formule - c’est du fait d’être que doit s’occuper le philosophe, et ce fait d’être est représenté par un singulier générique. Casertano a donc raison lorsqu’il dit que Parménide utilise la formule το έόν, ‘l’ente, «ciò che è»', et qu’il ne parie pas de ‘l’être’. Mais on peut lui répondre: parler de τό έόν, est parler de ce que ‘tous’ les philosophes grecs on appelé ‘l’être’. La très connue phrase d’Aristote en est une confirmation: «Il y a une certaine science qui étudie τό ôv ή ôv» (Mét. 1003a21). La traduction littérale de la formule est, bien sur, «ce qui est, en tant qu’il est», mais personne ne peut nier qu’Aristote envisage ce que les philosophes appellent ‘l’être’. Personne n’a utilisé la formule qui devrait être traduite littéralement par ‘l’être’, τό είναι. Elle apparaît une fois chez Platon (Soph. 243 e2 mais elle concerne le ‘verbe’ être.

    Mais après avoir dit que, pour parler de l’être, Parménide utilise la formule 'ce qui qui est’, il s’interroge: «l’essere di B3 è la stessa cosa di τό έόν o indica qualcosa d’altro?». Or, DK 28B3 parle ‘d’être’, non pas de ‘l’essere’ (‘l’être’). Nous rentrons ici au centre du parménidisme, car, en effet, la découverte de Parménide concerne ‘le fait d’être’, une activité dénotée par un ‘verbe’, qui se concrétise ‘après’ dans un participe, τό έόν(2). Parménide commence par la découverte d'ἐστί (DK 28B2,3) et arrive, après, a concrétiser cet ἐστί dans ce qui ‘indéniablement' ‘est’, ‘ce qui est’ (τό έόν). Dans tous les passages décisifs de son Poème, Parménide présente sa découverte par l’intermédiaire des formes du ‘verbe’ être (et, parfois, directement par l’infinitif, comme en DK 28B3), représenté soit pas είναι suit par πελέναι(3). Et, contrairement à ce que dit Casertano (‘Tutti i σήματα di DK T H' riguardano «ciò che è»’), les σήματα du fr. 8 concernent exclusivement Γέστι: 'il reste un seul mot comme chemin: ώς εστιν. Sur ‘celui-ci’ (ταύτη δ’ έπί) (donc, a propos de ce ‘mot’) il y a plusieurs σήματα (DK 28B8,l-2). Comme le ‘seul’ sujet qui peut appartenir au dénudé έστι d’une manière claire, immédiate et distincte c’est τό έόν (car, qui pourrait nier que, s’il y a quelque chose qui εστιν, est ‘ce qui est’?), Parménide concrétise le dénudée εστιν dans ‘ce qui est’ (en réalité, dans la plupart des cas, sans l’article), et ce qui est un, inaltérable, complet, etc., est ‘ce qui est en train d’être’, [τό] έόν, qui garantit l’existence des étants." (p. 130)

    (2) Des détails sur notre position se trouvent dans notre contribution au volume consacré à Casertano: N.-L. Cordero, Etre (et nonpas L’Être) chez Parménide, in L. Palumbo (a cura di), λόγον διδόναι. La filosofia come esercizio del render ragione. Studi in onore di Giovanni Casertano , Napoli 2011, pp 107-114.

    (3) Voir DK28B2,3: έστιν; 28B6,1: έστιγάρείναι; 28B6,8: τό πέλειν τε καί ούκ είναι; 28Β8.1 : Μ έστι; 28Β8,11: πελέναι [...] ή ούχί; 28Β8,16: έστιν ή ούκ έστιν.

  52. ———. 2016. "Aristote, créateur du Parménide díkranos que nous héritons aujourd’hui." Anais de Filosofia Clássica no. 10:1-25.

    ;Abstract: "All studies consecrated to Parmenides reads his “Poem” as it had been written in this way: Introduction (fr. 1), Way of Truth (fr. 2-fr. 8.50), “Way of Seeming” (Doxa) (fr. 8.51- fr 19).

    However, this order was proposed in 1795 by G. G. Fülleborn, based on the interpretation of Simplicius, inspired by Aristotle. But Aristotle had already “platonized” Parmenides, by applying to him a dualistic scheme inexistent before Plato. If we don’t take care of Aristotle’s mistake, the interpretation of Simplicius, as well as Fülleborn’s arrangement, must be abandoned, especially because doxa, in Parmenides’ time, means “opinion” and have not an ontological value, synonym of “appearances”. There is not in Parmenides a study of two subjects (being and appearances) but a single subject, considered from two points of view opposites."

  53. ———. 2017. "La place de la "physique" de Parménide dans une nouvelle reconstitution du Poème ." Revue de Philosophie Ancienne no. 35:3-13.

    ;Résumé : "En 1795, G. G. Fülleborn publia un travail sur Parménide dans lequel, pour la première fois, on proposa un arrangement des fragments du Poème en deux parties, l’Alétheia (fr. 1 à 8.50 DK) et la Dóxa (fr. 8.51 à 18 DK). L’auteur avoue s’être inspiré de Simplicius, et cette division devint canonique. Or, le critère utilisé par Simplicius est une conséquence de la « platonisation » de Parménide, esquissée déjà par Aristote, qui trouve chez l’Éléate la dichotomie « sensible / intelligible ».

    Conséquence : il y aurait dans le Poème une théorie sur l’être et aussi sur les apparences. Il suffit de regarder ce que Parménide lui-même établit comme « vérité » et ce qu’il considère comme « dóxa » pour réfuter ce schéma et trouver dans le Poème une place pour les textes « physiques », qui ne correspondent pas à la « doxa », étant donné qu’ils ne sont ni trompeurs ni décevants."

  54. ———. 2018. "Quelques exemples de la « physique » contestataire de Parménide." Anais de Filosofia Clássica de Rio de Janeiro  no. 12:88-109.

    ;Résumé : "Chez Parménide, une analyse détaillée des citations authentiques de son Poème, sans tenir compte des commentaires, qui, depuis Platon, ont essayé de les interpréter, montre clairement qu'il y a une distinction entre ce qu'il appelle "doxa" et sa propre "physique". Cette distinction est malheureusement effacée dans la version du Poème, proposé en 1795 par G.G. Fülleborn et accepté aujourd'hui comme "orthodoxe". Dans cette version, les citations que Parménide consacre aux "doxai" des mortels, qui ne sont ni vraies ni convaincantes, cohabitent avec des fragments qui contiennent la véritable "physique" de Parménide. Cet article se propose de déchiffrer ce qui reste, dans cet ensemble, de la "physique Parménidienne" de Parménide."

  55. ———. 2018. " L’être parménidien selon Cerri: une realitè... irréale." In Eleatica Vol. 6: Dall'universo-blocco all'atomo nella scuola di Elea: Parmenide, Zenone, Leucippo , edited by Pulpito, Massimo and Ranzato, Sofia, 154-157. Sank Augustin: Academia Verlag.

    ;"En réalité, il est impossible de ne pas partager la thèse centrale de Cerri concernant Parménide: il s’est occupé, dit-il, de ‘il reale’, de ‘ciò che esiste oggettivamente’. Mais plusieurs questions se posent à propos de ces formules, la première: qu’est-ce qu’est ‘il reale’? D’autres philosophes, après Parménide, notamment Platon, ont forgé la formule ‘ontôs on’ , et, pour faire allusion à la totalité du réel il a utilisé ‘pantelôs on ’. Mais chez Parménide il n’y a qu’eon (et, très rarement,n ). Or, pour montrer que ‘la realtà è costituita dall’eon ’ (p. 53), Cerri emprunte un chemin très curieux qui fait de l'eon l’opposé de ce qu’il se propose soutenir, car il devient une abstraction totalement irréelle , une sorte de fantôme qui annonce la philosophie-fiction de Mélissos, créateur d’un eon qui n’a rien à voir avec ce qui est réel.

    Le fait d’attribuer un caractère ‘scientifique’ à ‘la metodologia-epistemologia della conoscenza’ (p. 49) parce qu’elle s’appuie sur l'esti, et la critique ‘dei falsi sapienti’ parce qu'ils font appel à des énoncés ‘imperniati sul ‘non è”, n’a pas de sens. Les ‘falsi sapienti’ utilisent, eux aussi l'esti : ils disent que ‘tout est en même temps un ensemble de lumière et de nuit obscure’ (fr. B9, 3), et le discours vrai n’hésite pas à faire appel à l'ouk esti quand il affirme que l’un des chemins 'n’est pas le vrai chemin’ (fr. B8, 17).

    Mais le point le plus contestable de l’interprétation de Cerri est l’antithèse radicale qu’il trouve entre le pluriel eonta et le singulier eon. Pour lui, eonta ‘sono doxai’ (p. 54), tandis que l'eon ‘è il reale’. C’est évident que Cerri est victime d’un préjugé qui découle de l’interprétation d’Aristote, qui avait envisagé Parménide à la lumière de son propre système (Platon, en revanche, avait été plus prudent), selon lequel l’Éléate, d’une part, s’exprimait monachôs, mais ‘obligé par les phainomena '' (Metaph . 986 b), avait proposé deux ‘principes’, lumière et nuit. L’inexactitude d’Aristote est plus qu’évidente, car, dans les passages authentiques du Poème que nous conservons aujourd’hui - et qu’Aristote sans doute connaissait - Parménide attribue la postulation (katethento, fr. B8, 53) de deux principes aux ‘mortels qui ne savent rien’." (p. 154)

  56. ———. 2019. "Il y a, évidemment, un « Parménide phusikós », mais… (à propos de Livio Rossetti, « Un altro Parmenide », 2017) " Archai. The Journal of Archetypal Cosmology no. 25:1-29.

    ;Résumé : "Comme tous les Présocratiques, Parménide s’est intéressé à la phúsis ; donc, considérer qu’il était un phusikós , c’est tout à fait naturel. L. Rossetti, dans son capolavoro en deux volumes Un altro Parmenide (Diogenes Multimedia, Bologne, 2017), a étudié d’une manière très détaillée la question. Cependant, la perspective à partir de laquelle Rossetti a envisagé la question n’a pas pu se dégager de deus obstacles principaux : la place dans laquelle se trouvent les textes « physiques » (à l’intérieur de la « doxa ») et le caractère négatif que la « doxa » a aux yeux de Parménide. En effet, en fonction d’une division arbitraire du Poème en deux parties, proposée par G.G. Fülleborn, en 1795, les textes « physiques » de Parménide seraient à l’intérieur d’ « un ordre trompeur de mots », qui commence au vers 8.51 et se termine au fr. 19, ce qui anéantie la valeur d’une physique parménidienne. La seule façon de revendiquer une physique chez Parménide consisterait à séparer ses textes physiques de la « doxa des mortels », critique par la Déesse.

    Évidemment, cette possibilité suppose une critique d’une partie de la tradition doxographique, initiée par Aristote."

  57. ———. 2019. "Pourquoi Sextus cite le fr. 7.2 (DK) de Parménide après le vers 30 du fragment 1 (DK) ?" In Parmenidea. Venti scritti sull'Eleate e i suoi "eredi" , 97-103. Baden-Baden: Academia Verlag.

    ;Conférence prononcée à l'International Association for Presocratic Studies 6, Delphi, juin 2018.

    Traduction anglaise: "Why Simplicius quoted the fr. 7.2 (DK) of Parmenides after the fr. 1.30 (DK)?" disponible sur academia.edu.

  58. ———. 2020. "Parménide phusikós, oui, mais." In Verso la filosofia: Nuove prospettive su Parmenide, Zenone e Melisso , edited by Galgano, Nicola, Giombini, Stefania and Marcacci, Flavia, 195-198. Sankt Augustin: Academia Verlag.

    ;"Le Parménide de Rossetti est en réalité un Parménide ‘platonisé’, mais non par Platon, mais par Aristote et Simplicius. Aristote, qui a du mal a ranger Parménide parmi les phusiologōi, interprète que, malgré tout, il aurait du s’occuper du sensible, et affirme que, “obligé par les phénomènes, il a proposé aussi deux arkhai ” (Met. 985b31).

    C’est absurde. Ce n’est pas Parménide, mais les ‘mortels’ qui ont, comme les philosophes précédents, trouvé une explication de ‘la réalité’ (non ‘du sensible’) moyennant des éléments. La dichotomie sensible/intelligible ne se trouve pas chez Parménide. La doxa parménidéenne n’est pas l’‘apparence’ d'un Être occulte.

    Simplicius systématise la platonisation de Parménide quand il dit que, “dans son discours sur l'opinion, il pose comme principes le froid et le chaud. Il les appelle feu et terre, lumière et nuit ou obscurité” (In Phys . 170). Grâce à Simplicius, Parménide devient díkranos ...

    Un Parménide phusikós ? Pourquoi pas, mais en fonction de sa découverte, le fait d’être, qui empêche que ce qui est (lune, soleil, sexes, voie lactée) ne soit pas." (p. 198)

  59. ———. 2021. "Le très curieux silence des Doxographes à propos de l'incompétence des auteurs des opinions chez Parménide." Journal of Ancient Philosophy no. 15:1-17.

    ;Abstract: "Since the Goddess of Parmenides presents the two ways to explain the reality that must be faced by this who want to become a "man who knows", the truth and the opinions of mortals, she makes clear that the opinions (dóxai) are not "reliable". Later, when he describes in detail how the makers of opinions really are, the description is devastating: they are the people who are incapable of judging, who are astonished, who do not know how to use sensations, and who have a misguided intellect. Consequently, when they express their opinions, they present only a "misleading set of words". However, already from Aristotle onwards, this way of conceiving reality is attributed to Parmenides himself, and not to "the mortals". Theophrastus echoes this interpretation of Aristotle and, with him, the totality of the Doxographers. Obviously, in order to attribute the "opinions" to Parmenides himself, any reference to the incapacity of his authors is absent from the comments: no Doxographer mentions it."

  60. ———. 2022. "Les deux manières d’expliquer la réalité proposées par Parménide." Peitho. Examina Antiqua no. 13:13-23.

    ;Abstract: "Towards the end of fragment 1 of his Poem, Parmenides puts forward two methods or paths that a priori explain the same object of study: the existence of the fact or state of being. One of the options leads to the core of the truth and is, therefore, pursued. The other is merely a set of contradictory opinions and is, accordingly, abandoned. These two paths are expounded in the rest of the Poem, while fragment 4 shows that even the erroneous conception, which had to be set aside, can still be fruitful. Once the firm foundation of truth has been established, fragments 10 and 11 propose to widen the inquiry to the whole of reality. This interpretation suggests a rejection of the arrangement of the Poem that has become canonical, and a criticism of the doxographic tradition that since Aristotle has “Platonised” the philosophy of Parmenides by assimilating the “opinions” (which are only points of view) to the “appearances” (in the Platonic sense of the term)."

  61. ———. 2023. "L’aristotélisation de Parménide, est-elle un parménidicide ?" In Eleatica Vol. 9: Aristotle and the Eleatics = Aristotele e gli Eleati , edited by Pulpito, Massimo and Berruecos Frank, Bernardo, 135-146. Baden-Baden: Academia Verlsg.

    ;"Le titre de cette communication, “L’aristotélisation de Parménide, est-elle un parménidicide?” pourrait sembler exagéré, mais je ferai de mon mieux pour le justifier, de la manière la plus succincte possible.

    Le défaut principal de l’aristotélisation de Parménide, est son héritage. Les notions, comme les gens, ont des ancêtres, et l’ADN originaire reste dans les descendants.

    C’est le cas d’une erreur de lecture de la part d’Aristote (nous justifierons ce mot, car il ne s’agit pas d’une interprétation erronée, mais d’une faute; Platon n’a pas commis cet erreur, même si son interprétation peut être considérée partielle) qui a déterminé, à partir de lui (via Simplicius et G. G. Fülleborn) la destinée des études parménidiennes." (p. 136)

    (...)

    "La véritable tragédie grecque à laquelle nous avons fait allusion dans nos travaux récents cités ci-dessus commence en 1795 quand le philosophe kantien Georg G. Fülleborn écrit le premier livre consacré exclusivement à la pensée de Parménide(11). Le travail est excellent, et, tel qu’on attend d’un chercheur sérieux, il envisage la pensée de Parménide selon un critère herméneutique, dans l’occasion, d’origine kantienne, qui distingue, d’un point de vue gnoséologique, l’intelligible et le sensible. Et, en fonction de ce critère, Fülleborn divise les dix-huit(12) fragments en deux “sections”. Un ensemble de textes font partie du “Vernunfterkenntniss vom Wesen der Dinge” (p. 55), et un autre ensemble s’occupe du “Sinnliche Erkenntniss vom Wesen der Dinge” (p. 81). Mais l’ADN aristotélicien apparaît à la page 54, quand Fülleborn reconnaît que “ita dividit carmen Parmenidis Simplicius”. Et il a raison; après avoir transcrit quelques vers concernant l’être-Un, Simplicius, s’inspirant d’Aristote, écrit: “Ensuite Parménide quitta l’intelligible pour le sensible, ou, selon ses propres termes, la vérité pour l’opinion (δόξα) […] Et établit, lui aussi, comme principes élémentaires des choses engendrés, l’opposition première, qu’il appelle ‘lumière et obscurité’ ou ‘feu et terre’ ou ‘dense et rare’ ou ‘le même et l’autre’“ (In Phys . 30)" (pp. 136-137, certaines notes ont été omises)

    (11) Fülleborn 1795 [1795, Fragmente des Parmenides , Züllichau], passim .

    (12) Le fragment 19 fut ajouté en 1810 grâce a la découverte d’A. Peyron 1810 [Empedoclis et Parmenidis fragmenta ex codice Taurinensis Bibliotheca restituta et illustrata, Leipzig], 55-61.

  62. ———. 2024. "Les conséquences tragiques pour Parménide d'une erreur d'Aristote." Journal of Ancient Philosophy no. 18:1-24.

    ;Abstract: "The difficulty of grasping the thought of Parmenides led interpreters already in antiquity to approach his philosophy according to later schemes of thought. This was the case of Aristotle, whose interpretation was inherited by his disciple Theophrastus and by his commentators, especially Simplicius. Simplicius, a Neoplatonist and Aristotelian at the same time, proposed an interpretation, strongly dualistic (dominated by the sensible/intelligible dichotomy), which is not found in the recovered quotations. The origin of this interpretation is an "error" of Aristotle, inherited by Simplicius, who attributed to Parmenides himself the paternity of the "opinions of mortals". In 1795 G. G. Fülleborn, inspired by Simplicius, proposed a division of the Poem into two "parts", unanimously accepted today, and which must be urgently revised and rejected."